21 juin 1791
Le 21 juin 1791, une luxueuse berline s’arrête au relais de poste de Sainte-Menehould. Le valet de l’équipage ne semble pas inconnu à l’aubergiste. Où a-t-il pu avoir déjà vu ce visage ? Une pièce de monnaie, un Louis, qu’il vient de recevoir de ces visiteurs lui éclaircit la mémoire. Il est convaincu d’avoir reconnu le Roi. Il se lance à la poursuite de la voiture et la fait arrêter par les autorités révolutionnaires à Varennes. Le Roi démasqué, bloqué à Varennes, puis rejoint par les émissaires de l’Assemblée, doit faire demi-tour.
Sur le chemin du retour la Garde nationale forme la haie, mais la crosse en l’air, comme pour un enterrement. La consigne : « Quiconque applaudira le roi sera bâtonné, quiconque l’insultera sera pendu » était inutile.
La fuite du Roi marque une rupture déterminante. Pour une grande partie du Peuple, la mythologie royale s’effondre. Si ce rejet du Roi est variable selon les régions, il est net à Paris dont la population manifeste sa désapprobation lors du passage du cortège royal par un silence lourd de sens. En quelques jours, l’idée républicaine passe du statut de vague possibilité théorique à celui d’une alternative concrète. Condorcet (1743-1794), républicain convaincu, prononce le 8 juillet une déclaration qui fait date : De la République, ou Un roi est-il nécessaire à l’établissement de la liberté ? Des adresses remontent des provinces et des pétitions sont rédigées pour exiger la mise en place d’une République. Pour la première fois, un mouvement populaire se dessine en sa faveur. Cependant, celui-ci se heurte à l’opposition farouche de la majorité de l’Assemblée.
Malgré la trahison royale, l’Assemblée décide de défendre la monarchie quoi qu’il en coûte. Elle entérine le mensonge de l’enlèvement du roi et organise la répression contre les républicains.
Lorsque ceux-ci déposent leur pétition au Champs de Mars le 17 juillet, la troupe, sous les ordres de La Fayette (1757-1834), tire sur le peuple. L’unanimisme de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 est bien loin. La question républicaine divise le mouvement révolutionnaire. Après une courte parenthèse, la République redevient un mot tabou. Mais en cherchant à rejoindre les armées étrangères, le Roi s’est perdu et a signé la fin inéluctable de la monarchie.