Syndicalisme – Le procès de l’acharnement

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Des centaines de personnes sont venues soutenir hier (Lundi 15 octobre) les cinq militants CGT,
 poursuivis pour avoir tagué des slogans sur les murs d’enceinte de la sous-préfecture lors du mouvement contre la réforme des retraites en septembre 2010.« En 2010, je faisais un meeting à Roanne, lorsque Serge Lenoir (secrétaire de l’union locale CGT-NDLR) m’a demandé de faire partie du comité de soutien aux cinq militants, lance au micro Éric Coquerel, secrétaire national du Parti de gauche. Je ne pensais pas que cinq mois après la défaite de Sarkozy, il faudrait se réunir de nouveau pour exiger la relaxe des cinq. » Et pourtant… Hier midi, ils étaient bel et bien plusieurs centaines, rassemblés devant la cour d’appel de Lyon, pour soutenir les cinq militants CGT de Roanne, appelés de nouveau devant la justice.

En septembre 2011, Cristel, Christian, Jean-Paul, Gérald et Didier, tous fonctionnaires et militants chevronnés, ont été condamnés par le tribunal correctionnel de leur ville à 2 000 euros d’amende avec inscription au casier judiciaire, pour avoir, l’année précédente, en plein mouvement contre la réforme des retraites, peint des slogans sur les murs d’enceinte de la sous-préfecture. Une condamnation prononcée alors même que la préfecture ainsi que le député UMP Yves Nicolin visé par les tags avaient retiré leur plainte : c’est le parquet qui a maintenu les poursuites. Sur les marches de la Cour d’appel fraîchement rénovée, c’est un véritable meeting pour la liberté syndicale qui s’organise avec des interventions de cégétistes, d’un porte-parole de la ligue des droits de l’homme, de la maire socialiste de Roanne, d’Éric Coquerel et du secrétaire national du PCF, Pierre Laurent, pour réclamer la « relaxe immédiate » des cinq. Jacky Teillol, ancien secrétaire départemental de l’union départementale CGT de la Loire, et choisi pour présider le comité de soutien aux cinq car il a vécu la criminalisation de l’action syndicale dans l’affaire Manufrance il y a vingt ans, rappelle que 8 500 personnes ont rejoint ce comité et loue « l’esprit de solidarité, effective et affective » qui se manifeste. « De toute évidence, nous sommes face à des comportements revanchards de magistrats du parquet, appuie Michel Doneddu pour la confédération CGT. Mais le parquet est sous la tutelle du ministère de la Justice, la responsabilité du gouvernement est engagée dans cet acharnement judiciaire contre des syndicalistes. » Si la maire de Roanne « veut croire que l’ère de la criminalisation de l’action syndicale est révolue », Éric Coquerel, Pierre Laurent et la CGT rappellent la promesse du candidat François Hollande de promulguer une loi d’amnistie pour les syndicalistes. « Elle aurait pu être votée dès juillet, tout comme la loi empêchant les licenciements boursiers », s’emporte Pierre Laurent, qui souligne le contraste saisissant entre une « bande de pigeons écoutée en quelques heures par le gouvernement et des millions de salariés qui ont voté pour lui et qui ont du mal à se faire entendre ». L’audience d’appel durera à peine une heure. L’avocat général voit dans la peinture de slogans un «acte grave, qui montre un mépris du bien commun », et invite les juges à confirmer la condamnation « tout à fait pertinente » de Roanne, y compris l’inscription au casier qui fait peser sur les cinq fonctionnaires un risque de révocation. S’ils montrent leur bonne volonté en payant l’amende, ils pourront toujours demander par la suite la non-inscription, fait-il valoir. À l’inverse, Karine Thiebault, avocate des cinq militants, souligne à quel point « cette condamnation résonne comme une volonté de pénaliser l’action syndicale », puisqu’il n’y a « pas de plaignant, pas de victime, pas de trouble à l’ordre public et pas de délinquants », et demande la relaxe pure et simple, ou, à défaut, la dispense de peine, ou, au moins, la non-inscription au casier. La Cour d’appel rendra sa décision le 19 novembre.

 

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