Jean Luc Mélenchon à Buenos Aires

Jean-Luc Mélenchon et le collectif de soutien au Front de Gauche en Argentine : une rencontre pour réfléchir sur la suite.

Melenchon_argentine1

Samedi 13 octobre, 15h : nous sommes une bonne dizaine de Français et de Franco-Argentins à attendre Jean-Luc dans le hall de son hôtel à Buenos Aires. Nous avions reçu la veille un courriel de notre camarade Lalo qui avait réussi à trouver un créneau dans l’agenda extrêmement chargé  de Jean-Luc. Nous y sommes, Jean-Luc et Lalo s’approchent, ils ont tous les deux l’air fatigué mais heureux. Jean-Luc nous propose de monter dans la terrasse de l’hôtel. Il n’a qu’une seule envie : sortir de l’enfermement qu’il a vécu ces jours-ci entre les salles de conférences et son hôtel. Nous nous installons, un silence de cinq ou dix secondes sera juste le prélude du tourbillon. En effet, il a tout juste pris un peu de souffle pour retrouver toute son énergie et nous dresser un tableau détaillé de la situation en France et en Europe, notamment les conséquences prévisibles suite à l’approbation du  traité budgétaire européen. Un scénario proche de la situation argentine en 2001 n’est pas si loin que l’on voudrait le croire. En Argentine, nous en connaissons : restrictions budgétaires, institutions sans pouvoir, classe politique décrédibilisée, perplexité des dirigeants qui, ne sachant pas (ne voulant pas) réagir, cèdent le pouvoir politique aux experts qui incarnent la loi du marché.

Il est donc temps de résister, comme toujours, mais aussi de réfléchir et construire avec patience l’alternative nécessaire. Nous le savons aussi en Argentine, les Etats ne disparaissent pas, même s’ils ne payent pas leurs dettes. Et le pays où nous vivons l’a bien montré depuis 2003.  C’est pour cela que le séjour de Jean-Luc a l’air d’être riche, très riche. L’Argentine montre qu’une autre politique est possible : récupérer les ressources stratégiques (comme ça a été le cas pour le pétrole récemment), retrouver une croissance accompagnée de nouvelles formes de redistribution de la richesse, démocratiser la société en sanctionnant de nouveaux droits sociaux et civiques, démocratiser la circulation de la parole et des idées grâce à une nouvelle loi qui s’oppose à la construction des oligopoles médiatiques.Melenchon_argentine3

Les échanges se font plus longs que prévu, nous voulons en savoir plus, nous posons des questions à Jean-Luc qui répond toujours en nous apportant des arguments pour les combats qui suivront. Les temps qui viennent ne seront pas faciles en Europe et ils ne sont pas simples non plus de ce côté de l’Atlantique. Nous l’avons vu récemment au Paraguay, avec ce nouveau type de « coup d’Etat parlementaire » qui a viré un président démocratiquement élu en moins de 24h, en Honduras également il y a tout juste quelques mois. Les gouvernements, qu’ils soient plus au moins à gauche, ne peuvent pas résoudre tous les problèmes de ce continent, la dispute est rude. Les Latino-Américains sont politisés : à gauche, mais également à droite et il ne faut pas l’oublier. En 2008 les grands patrons de la nouvelle « industrie » agroalimentaire ont paralysé l’Argentine pendant des mois, tout juste après l’élection de la nouvelle présidente. En 2012, après une nouvelle élection, la pression vient de grands groupes médiatiques et des secteurs réactionnaires qui voient menacés les principes de la cupidité et de la propriété privée comme bases de constitution de toute subjectivité.

Mercredi dernier, le jour même de l’arrivée de Jean-Luc en Argentine, des paysans de la province de Santiago del Estero, au nord du pays, ont été attaqués par des mercenaires envoyés par les patrons d’une importante entreprise de l’agro-business (comme on les appelle désormais). Il s’agit de paysans qui sont là depuis des dizaines d’années et que cette nouvelle oligarchie s’acharne à expulser afin d’occuper leurs terres. Leur nouvelle stratégie est de semer la peur, ils avaient déjà tué un paysan en octobre 2011 dans cette même région. Tout juste un an plus tard Miguel Galván a été égorgé devant ses amis et sa famille : il avait juste une autre conception de la terre et des aliments, intolérable pour cette nouvelle oligarchie qui bataille pour imposer les OGM et la monoculture du soja transgénique. 

Des leçons de l’Argentine encore : les révolutions démocratiques ont toujours des opposants, la résistance n’en finit, peut-être, jamais.

Commentaires

Les Commentaires sont clos.