Lettre ouverte de Françoise Verchère • "Cher" Jean-Marc Ayrault

Ainsi donc, comme le dit la sagesse populaire, le monde est décidément tout petit. Voilà que tu as à t’occuper des hauts-fourneaux de Florange et de ma Lorraine natale. Moi qui ai grandi sous le nuage rouge-orangé de Longwy et au rythmes des coulées de son aciérie, je connais bien la lente agonie de la sidérurgie et les promesses politiques régulièrement non tenues.

Florange

Bien que sans grande illusion désormais, j’avais pourtant envie de croire à la proposition de nationalisation provisoire et au plan de ton Ministre du Redressement Productif. Mais tu as tranché. A ta manière. En balayant d’un revers de main une solution qui avait le mérite au moins du volontarisme. Sans concertation avec les principaux intéressés, ministre et syndicats… Et en laissant pantois ceux qui te croyaient partisan du dialogue.

Te dire que j’en ai été surprise serait mentir. En Loire-Atlantique, tu n’as jamais agi autrement. Pas de conflit avec les puissants, c’était ta manière de faire. Lorsqu’en 2007, la ville de Bouguenais que je dirigeais alors a osé se rebeller contre Total, cette merveilleuse entreprise qui nous a gratifiés de quelques marées noires mais qui a joué au mécène pour la biennale culturelle sur l’Estuaire, tu as été le seul – avec le représentant de Total -à me reprocher notre action. Au nom de l’emploi d’ailleurs. «  On ne s’attaque pas à une entreprise qui emploie des milliers de salariés » m’as-tu dit alors. 

Certains qui découvrent ta personnalité disent que tu confonds autorité et autoritarisme. Ils ont tort. Tu ne confonds pas. Tu es autoritaire parce que cela fait trop longtemps que tu exerces le pouvoir et surtout tu es fondamentalement plus prêt à ménager ceux qui ont le pouvoir économique qu’à tenter d’aider ceux qui le subissent. Le courage, ce n’est pas, au chaud de Matignon, de balayer de la main une piste de maintien de l’activité à Florange, en faisant confiance à quelqu’un qui n’a jamais tenu ses promesses, ce n’est pas non plus d’envoyer pendant près d’un mois et demi plus de 500 gardes mobiles à Notre Dame des Landes pour aider un groupe privé à nettoyer le terrain de son futur aéroport inutile. Le courage ce serait ici d’accepter de reprendre le dossier et en Moselle d’essayer –même si c’est difficile- de tenir tête à Mittal et de garder aux ouvriers leur outil de travail. En fait d’être de gauche, tout simplement…

Françoise Verchère, conseillère générale de Loire-Atlantique

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