Le vide-grenier austéritaire

Vide-grenier On pourrait se croire dans une sorte de concours Lépine de l’austérité. Sauf que ce dernier récompense l’inventivité et non les vieilles recettes.
C’est plutôt un vide-grenier austéritaire. Les solutions éculées remisées au plus profond des soupentes sont de retour sur les trottoirs.

Emmanuelli nous propose… l’inoxydable allongement de la durée de cotisation ! Le dernier qui nous l’a refourguée, il y a deux ans seulement, promettait déjà qu’elle comblerait les déficits. Je ne me souvenais pas qu’à l’époque, Emmanuelli en ait voulu.

Le rapporteur général PS de la commission des finances, Eckert a, lui, ressorti la hausse de la TVA. Il s’était vanté de retirer cette épave de la circulation à l’été dernier, avant d’en voter une première tranche il n’y a même pas trois mois. Puisque les pires ruines sont les bienvenues, tout le gouvernement s’y met.

Batho se souvient qu’elle a en rayon la hausse du diesel, Peillon calcule ce que pourrait rapporter la réforme des rythmes scolaires et Touraine celle de l’hôpital.

Tout est à vendre, pour pas cher. Demain ça ira mieux, on pourra tout racheter ! Des professionnels se sont invités dans la fête : les technocrates du ministère des finances ressortent les chargements de mesures d’économie dont ils font industrie et le MEDEF inonde la rue de productions frelatées mais lucratives, flexibilité, baisse du « coût du travail », accords compétitivité emploi…

Quand Ayrault, placier invisible et mutique, aura fini de relever les compteurs, le pays aura adopté sans même s’en rendre compte un nouveau plan d’austérité. Un de plus ! Au moins les gouvernements grecs, désireux de se faire bien voir de la Troïka et des agences de notation, tiennent la comptabilité de leurs plans successifs. En France, c’est la rigueur au fil de l’eau. Le mot austérité est interdit. La politique choisie se cache. La potion amère est répandue dans tous les plats en pensant qu’elle sera plus facile à avaler. Peut-être serait-ce le cas si ce n’était qu’un moment à passer. Mais l’austérité appelle toujours plus d’austérité. Qu’on me cite un seul contre-exemple ! L’engrenage austéritaire ne tourne que dans un sens : la fuite en avant. La seule manière de l’arrêter, c’est de le gripper puis de le faire voler en éclats. C’est comme cela que ça finira.

N’est-ce pas la leçon des élections en Italie ? Les partisans de l’Europe austéritaire étaient si convaincus de la victoire de leur candidat Mario Monti, ancien de Goldman Sachs, ex commissaire européen, bombardé sénateur à vie puis premier ministre sans qu’il y ait eu besoin d’élection. « Cet homme va-t-il sauver l’Europe ? » se demandait en Une le Time. Il affrontait une classe politique décrédibilisée. Les partis dominants étaient d’autant moins armés pour le contrer qu’ils avaient soutenu sa politique au Parlement. Las, Monti a été pulvérisé. Et tous les autres sont au tapis ! Le satiriste Bepe Grillo, ce candidat qui a refusé l’accès aux médias, au financement public, et a exclu tout soutien à un autre gouvernement que le sien, culmine à 25% sans même avoir un parti. Bepe Grillo était le candidat du « qu’ils s’en aillent tous ». Faute de l’incarner, l’autre gauche a été elle aussi tragiquement laminée. La vague balaye tout ce qui n’est pas un point d’appui pour elle. Demain elle dégagera tous ceux qui se sont associés aux politiques austéritaires, quels qu’aient été leurs remords ou hésitations. Une fois les étals rangés, ne reste plus que la bannière qui barre la rue : tout doit disparaître.

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