Pour un grand coup de balai ! Place à la 6e République !
En septembre 2011, Ségolène Royal ulcérée par les affaires du sarkozysme pourrissant s’était exclamée contre l’UMP : « A ce stade d’accumulation d’affaires et d’atteintes graves portées à la morale publique, la seule solution, c’est un bon coup de balai à ceux qui dirigent si mal le pays, font honte à la France ». Deux ans plus tard, même si le PS a pris la place de l’UMP, hélas, on ne saurait mieux dire. Coup de balai et changement de régime restent à l’ordre du jour. Mais l’heure n’est plus seulement aux commentaires et à l’attentisme. Faire de la politique, c’est savoir prendre des initiatives. C’est pourquoi Jean-Luc Mélenchon, avec l’accord de l’ensemble des forces du Front de gauche et sous doute au-delà, à pris l’initiative ce matin d’appeler à une grande marche pour la 6e République, le dimanche 5 mai à Paris.
J.-L. Mélenchon à » La Matinale » de France Info… par lepartidegauche
J.-L. Mélenchon à » La Matinale » de France Info… par lepartidegauche
Le coup de balai ! L’expression illustre notre volonté et notre colère. Le vocabulaire rude qui est le nôtre ne doit pas surprendre. Il est parfaitement conforme à la longue histoire du mouvement ouvrier. Pas de faux débats ni d’amnésie. Bien sûr, il y a par exemple la célèbre affiche de l’artiste russe Victor Déni en 1920 représentant Vladimir Illitch Lénine balayant le monde des banquiers et des rois (voir plus bas). Mais, l’image du coup de balai ne s’arrête pas à cette image. En 1932, le Parti socialiste qui s’appelait alors SFIO (Section Française de l’Internationale Ouvrière) l’utilisait dans sa propagande. L’affiche ici publiée en atteste. Dans un climat infect des années 30 où les affaires mêlant des politiques se succédaient, la SFIO n’hésitait pas à utiliser ce vocabulaire pour appeler à un profond changement de régime. Pourquoi faudrait-il en 2013 utiliser une parole plus « soft » que dans ces années là ? C’est pourtant de ce climat pourri d’affaires et de corruption, je pense bien entendu à la célèbre « Affaire Stavisky », que profitait l’extrême droite de l’époque et qui fabriquera la personnel politique de la France de Vichy.
Du balai ! Place au Peuple ! Passons à la 6e République ! Voilà quelques uns de nos slogans. Plus personne ne peut nier que nous sommes désormais en pleine crise de régime d’une ampleur sans précédent. « L’affaire Cahuzac », dont la chaîne de responsabilité et de mensonges va du PS au FN, ne constitue que la partie immergée d’un système oligarchique où politiques de divers bords et milieux d’argents cohabitent avec la plus grande aisance. A ce titre, l’ancien Ministre du Budget n’est pas un homme seul. Ses mœurs infâmes sont aussi celles de nombreux hommes et femmes politiques. C’est trop facile de considérer que le problème serait réglé par la démission de Cahuzac. On ne tournera pas la page ainsi. Si cet homme a connu un parcours politique aussi fulgurant, ce n’est pas par ses prétendues compétences à mettre en œuvre l’austérité, c’est qu’il était aussi le plus pur représentant de cette nouvelle caste politique arrogante, sûre de sa force, de ses privilèges et qui se croit tout permis. Durant la mandature précédente, il savait que personne à l’UMP ne viendrait l’embarrasser en révélant ses affaires car elles ne sont que la reproduction d’un comportement largement partagé. Ce sentiment de toute puissance est d’ailleurs l’explication pour laquelle ce même Cahuzac a même cru possible de faire impunément des affaires avec un homme comme Philippe Péninque, un très proche de Marine Le Pen. Dans cet entre soi de cyniques,on oublie la prudence et Cahuzac n’a pas hésité à confier un lourd secret, susceptible de briser sa carrière politique, a un ancien dirigeant du groupuscule d’extrême droite GUD, conseiller officieux de la famille Le Pen, et avocat spécialisé dans l’ouverture de compte discret à l’étranger. Il a aussi cru possible de le faire car il savait qu’à l’extrême droite, on est coutumier des secrets qui protègent les puissants, des comptes en banque à l’étranger et notamment en Suisse. Philippe Péninque lui garantissait la confidentialité et il a tenu parole.
Finalement, les mœurs et les mésaventures de M. Jérome Cahuzac sont les mêmes que ceux de M. Jean-Marie Le Pen qui, lui aussi a longtemps détenu un compte en banque en Suisse, suite à l’héritage des ciments Lambert, révélé après son divorce par son ex femme, mère de Marine Le Pen. L’avocat de l’ex femme de Le Pen qui dénonçait publiquement ce compte en Suisse s’appelait… Gilbert Collard. Cela n’a pas empêché ce dernier de faire aujourd’hui de la politique dans un parti dont il sait que le Président fondateur est aussi peu irréprochable que l’ex ministre du budget. « Fraus omnia corrumpit » est un adage juridique latin, qui signifie « la fraude corrompt tout » et que connaissent tous les avocats. Je laisse donc les Collard, Le Pen et Péninque à leurs turpitudes… une chose est certaine, tous ces comportements disqualifient le FN pour faire la morale à qui que ce soit. Il est une des pièces de ce système pourri. Il en est même la béquille.
Ceux qui ne perçoivent pas la gravité du moment sont des naïfs, des irresponsables ou des coupables conscients. La 5e République, régime autoritaire né en pleine crise algérienne sous la menace d’un coup de force, est en pleine décomposition. Historiquement, la gauche française s’est reconstituée et rassemblée autour de la critique de la Ve République. François Mitterrand, dans les années 60,rédigea son livre « Le coup d’Etat permanent » dans lequel il écrivait avec force contre la 5e République : « Les républicains ne sont pas démunis. Au régime vieillot qui s’applique à perpétuer une société agonisante ils peuvent opposer une promesse féconde d’un monde nouveau où la loi, sage et hardie, fera du peuple son propre maître. Ils ont de leur coté la liberté et la justice. S’ils l’osent, ils auront l’espérance. » Les dirigeants socialistes, une fois en responsabilité, ont oublié tout cela. Il n’empêche.
Nous vivons l’heure des grands bouleversements et peut être des révolutions. Je le souhaite. L’issue à cette crise n’est pas écrite. Elle peut être sombre comme lumineuse. Elle dépendra des tempéraments et de l’audace des uns et des autres. Il ne faut pas avoir peur de l’incertitude du moment. Romain Rolland disait « Quand l’ordre est injuste, le désordre est souvent le début de la justice ». Les bavardages de toutes sortes selon lesquels les conditions historiques ne seraient pas encore « mûres » pour passer à la 6e République ne sont que le produit de l’ignorance ou d’une tromperie consciente. Les prémisses objectives de ce changement ne sont pas seulement mûres ; elles ont même commencé à pourrir. Vite la 6e République !