Une circulaire pour dissuader les remunicipalisations
Le désengagement de l’État se poursuit à l’égard des collectivités locales. Une récente circulaire de la DGFIP (Direction Générale des Finances Publiques), le bras armé de l’État en matière de recettes et de dépenses, expose en détail comment circonvenir des autorités locales qui se seraient laissées aller à certaines décisions. Il s’agit d’engager selon une annotation de la main du directeur de la DGFIP une « concertation avec les collectivités locales pour maîtriser l’augmentation des charges de la DGFIP découlant de la ré-internalisation de la gestion de certains services publics locaux ». En clair, il faut inciter les élus à reconsidérer leurs éventuelles décisions de re-municipaliser certains services comme la gestion de l’eau ou des ordures ménagères sachant ce que cela pourrait leur coûter. Tout un argumentaire explicite les moyens de faire pression sur les récalcitrants en usant du bâton comptable au mépris des choix démocratiquement faits par une population.
On attend ainsi des agents comptables qu’ils sensibilisent les ordonnateurs « aux transferts de charge induits » par leur décision. Il s’agit de leur expliquer que de nouveaux moyens, de nouveaux emplois ne seront pas débloqués pour faire face à l’augmentation des charges découlant de la nouvelle situation de ré-internalisation de services. Ce surcroît de travail ne pourra venir qu’en déduction de celui effectué aujourd’hui. Les recettes en pâtiront. Les poursuites, par exemple, vis-à-vis des mauvais payeurs, faute de temps et de bras, seront limitées, diminuant ainsi la trésorerie de la collectivité.
Ainsi, c’est quasiment en prenant en otage les services comptables que la direction de la DGFIP compte faire pression, par ricochet, sur les élus. Les premiers n’auront plus les moyens d’assurer leur mission. La trésorerie des seconds en souffrira, affectant l’ensemble des projets de la collectivité. On voudrait favoriser la gestion privée des services que l’on ne s’y prendrait pas autrement, oubliant qu’au final la qualité des services est supérieure lorsqu’ils sont publics et les factures d’un montant moins élevé, même en prenant en compte l’argument des économies d’échelle. Bref, cette circulaire illustre, au niveau communal, la volonté politique et technocratique libérale déjà mise en musique au niveau européen. La loi du marché s’insinue jusqu’aux plus petits niveaux dans tous les mécanismes de décision et de gestion. Ne nous y trompons pas : la démocratie ne se débite pas en tranches et doit être défendue en bloc à tous les niveaux.
Lire aussi le commentaire de Gabriel Amard, secrétaire national du PG, sur cette circulaire : www.gabrielamard.fr