Les provocateurs
C’est un calcul politicien dont les conséquences pourraient s’avérer désastreuses. Une brochette de solfériniens a décidé de tout faire pour focaliser le débat des élections municipales sur les pires clichés sécuritaires. Le cirque bat déjà son plein à Marseille, sur laquelle s’est abattue une primaire PS. Des candidats sans imagination, fruits racornis du système Guérini, rivalisent de bêtise pour se faire remarquer. Les appels à l’armée lancés par Samia Ghali lui ayant valu une notoriété que son activité au Sénat ne lui avait jamais procurée, Casellli se prononce pour l’utilisation de drones. Feront-ils synthèse au deuxième tour pour des drones militaires ? Ces galéjades n’ont aucune efficacité policière. Elles encouragent la déshumanisation de la police opérée sous Sarkozy alors que Marseille en montre l’échec. Si le trafic s’est enraciné, c’est en effet que des quartiers sont traités comme les territoires de « l’ennemi intérieur », que les policiers ont été transformés en producteurs de chiffres imbéciles, que la présence dans les quartiers populaires et le temps laissé aux enquêteurs ont été vus comme des dépenses trop coûteuses.
Hélas le mauvais exemple vient d’en haut. Pour répliquer aux règlements de compte, Valls a appelé Gaudin à se doter d’une police municipale armée, parfaitement inapte à faire face au Milieu. Il veut « saturer l’espace » en envoyant des CRS dont le métier n’est pas d’appréhender des délinquants. Les voilà agents d’ambiance sécuritaire ! Mais tout le pays ne se sent pas concerné par Marseille. Alors Valls a créé la polémique sur les Roms. La France en compte 15000, soit un demi par commune. Mais parce qu’ils sont censés fondre à tout instant n’importe où, ce sont un bouc émissaire idéal. Alors qu’il ne devrait se préoccuper que de crimes et de délits, le ministère de l’Intérieur devient un ministère des populations, nouvelle victoire posthume de Sarkozy. La cible du renseignement intérieur est le « musulman ». Les unités de sécurité publique sont sommées de continuer les rafles de sans-papiers (car Valls tient à en avoir expulsé, à la fin de l’année, autant voire plus que ses prédécesseurs). Mais les cambriolages, dont 10% seulement sont élucidés ? Simple, ce sont les Roms ! Atlantiste fanatique, Valls applique la théorie du choc des civilisations et fait des crimes et délits l’œuvre de populations culturellement incompatibles.
Ces apprentis sorciers cherchent à faire diversion par rapport au désastre auquel conduisent leurs politiques austéritaires. Ils ciblent les plus pauvres au moment où la délinquance des riches explose. Les saisies d’argent liquide à la frontière au premier trimestre ont été multipliées par six par rapport à 2012. Mais aucun douanier supplémentaire n’a été déployé et le gouvernement n’a pas commenté la nouvelle. Moscovici était trop occupé à annoncer que les 20 milliards d’euros du crédit d’impôt aux entreprises seraient distribués « sans contrôle fiscal ». Lorsqu’un patron est condamné pour travail du dimanche, le gouvernement met en cause l’application de la loi. Hier l’ennemi était la finance, aujourd’hui c’est le Rom. Ce discours gouvernemental donne le coup de main idéologique au Front national. Cela fait d’ailleurs partie de leur calcul. Ils veulent à la fois jouer les municipales sur l’argument « c’est le FN ou nous » et prétendre que pour lutter contre le FN, il faut devenir sécuritaire. C’était déjà le calcul de Nicolas Sarkozy. Avec le résultat que l’on sait.