Le dimanche : ni caisse ni caddie
A peine une poignée de salariés épaulés sont-ils descendus dans la rue avec des tee-shirts « Yes week-end », le gouvernement nommait l’ex-PDG de La Poste pour présidait une mission… visant à généraliser le travail du dimanche. Il faut dire qu’à défaut d’être représentés par leurs syndicats, ces quelques salariés et leurs pseudo-collectifs étaient organisés par des militants de droite patentés ou conseillés par des agences payées par leurs employeurs… Lesquels se sont même offert le luxe, sachant bien que le gouvernement se coucherait devant eux, de braver l’interdiction qui leur était faite d’ouvrir un dimanche de plus !
Côté médias, les arguments des « grandes enseignes » sont passés en boucle. Ainsi, le dimanche représenterait 20% de leur chiffre d’affaire. Fermer le dimanche, ce serait donc tuer de l’activité et des emplois. Mais si le bricoleur a vraiment besoin d’un clou, il s’organisera pour l’acheter le samedi ou le lundi. A condition que les « grandes enseignes » embauchent plus de caissières ces jours-là, plutôt que d’organiser la pénurie ou de multiplier les caisses « libre-service », où le consommateur est « libre » de faire le travail… sans rétribution. Voilà qui créerait des emplois. A l’inverse, une étude du ministère du travail de 2006 montre que la généralisation du travail du dimanche, qui concerne déjà plus de 6 millions de français, détruirait 200 000 emplois dans les petits commerces. Raison pour laquelle la CGPME y est opposée.
On entend aussi que travailler le dimanche mettrait du beurre dans les épinards des seuls volontaires. S’il est vrai que la loi garantit une majoration salariale et un repos compensateur pour les cinq dimanches autorisés par arrêté municipal, les conditions des autres dimanches travaillés sont renvoyées au rapport de force qui s’exprime dans les conventions collectives. Pire : pour les magasins d’ameublement, la loi Debré de 2008 ne prévoit aucune majoration! Quant au volontariat, les témoignages entendus sur quelques radios confirment que l’acceptation du travail du dimanche conditionne bien souvent la signature du contrat d’embauche. Si les employeurs ont les moyens de payer beaucoup plus le dimanche, c’est qu’ils peuvent augmenter les salaires en semaine. On peut et il faut augmenter le SMIC à 1700 € brut. Voilà qui relancera l’activité. Quant aux étudiants qu’on priverait ainsi des moyens de poursuivre leurs études, rappelons que les solutions de progrès sont ailleurs : gratuité des études, construction de logements universitaires, allocation pour tous les jeunes en formation. Voilà qui les fera réussir !
L’offensive actuelle vise en fait la dérégulation totale des horaires. On sait pourtant par exemple que le travail de nuit réduit significativement l’espérance de vie en bonne santé. Le repos dominical est un acquis social datant de 1906. Quelle que soit la raison pour laquelle ce jour a été choisi, il reste aujourd’hui celui au cours duquel toute la société peut se retrouver. Entre amis, en famille, pour passer du temps ensemble et prendre soin les uns des autres, dans les associations, pour profiter de la vie. Sans acheter. Et sans perdre sa vie à la gagner.