Stéphane Burlot, résister par l’image

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Né à Sarcelles en 1969, Stéphane Burlot est un citoyen ordinaire, photographe devenu artiste engagé. Il a participé à de nombreux magazines musicaux depuis le début des années 1990 : Prémonition, Elegy, D-Side, Noise, Obsküre… Puis, il est devenu l’un des principaux photographes de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon pour le compte du Front de Gauche. Ce travail est recueilli dans un très bel album, Résistance, paru en 2012, chez Bruno Leprince. Son œuvre s’attache depuis à capturer l’énergie et la rage des travailleurs et des peuples en lutte, dans toute l’Europe.

Place au Peuple! : Stéphane Burlot, revenons sur votre parcours de photographe professionnel engagé en politique ? Pourquoi avoir suivi la campagne du Front de Gauche en 2012 ?

J’avais été assez éprouvé par la victoire de Sarkozy en 2007. Après l’abattement est apparu la volonté de faire quelque chose. Mais quoi ? Comment ? La politique était loin de ma culture familiale, je n’avais jamais milité et « la gauche de la gauche » semblait assez complexe à appréhender avec ses multiples composantes. J’ai alors longtemps essayé de comprendre ce qui se passait en dehors du PS, celui-ci étant hors jeu après la traîtrise du traité européen en votant avec l’UMP et contre le résultat du référendum. J’ai alors jugé qu’il y avait une réelle volonté chez Mélenchon d’unifier sous une même bannière, celle du Front de Gauche, toute « l’autre gauche » et qu’un Front de Gauche fort était le seul moyen de peser face au PS. J’ai alors participé aux manifestations pour les retraites en 2010, j’ai adhéré au Parti de Gauche, j’ai illustré l’actualité du parti et j’ai finalement été pris dans l’équipe de campagne. On m’a chargé de monter un groupement de photographes pour couvrir les nombreux événements qui allaient se présenter et fournir la communication de la campagne.

PAP! : Depuis, vous travaillez sur les mouvements sociaux en Europe, projet qui vous a conduit à suivre les principales manifestations de ces dernières années en particulier dans la Méditerranée. Que retenez vous de vos voyages : une Europe qui va mal ?

Oui très mal, même si pour un touriste de passage les choses peuvent paraître normales dans des villes comme Madrid ou Lisbonne. C’est déjà nettement moins le cas à Athènes où la misère est très présente. En discutant avec les gens, on perçoit beaucoup de difficultés dans la vie quotidienne, beaucoup de colère parfois de la haine envers la Troïka mais aussi beaucoup de résignation. Les immenses manifestations, les grèves générales à répétition n’ont servi à rien, avec des gouvernements qui s’entêtent et n’écoutent pas, les gens sont découragés et se sentent impuissants.

PAP! : Dans ce nouveau travail, vous jouez beaucoup sur la chromatique (les couleurs des marées espagnoles, ce rouge de la gauche révolutionnaire et en lutte qui est omniprésent). On y retrouve votre goût pour la lumière comme dans les beaux portraits du Front des luttes, quand l’éclairage détache les salarié-es en lutte sur fond de grisaille, comme si l’image capturait cette dignité que le capital a voulu piétiner et qui renaît dans le combat. Vous construisez une esthétique de la photographie des luttes.

Oui j’avais envie de donner une autre dimension à ces événements et à ces gens qui luttent, en réalisant des portraits avec une lumière soignée qui porte l’attention sur eux, une esthétique poussée que je n’avais pas encore vue pour ce genre de sujet. C’est avec cette envie qu’est née cette série que je nomme « Nos rêves, leur cauchemar ». J’essaie de construire quelque chose de différent visuellement, qui mette en valeur ces manifestants et donne envie de les rejoindre.

PAP! : Vous avez choisi trois photographies pour illustrer cet entretien. Pourquoi celles-ci ?

La première est celle d’un pompier romain. C’était lors de ma première manifestation à l’étranger, fin 2012. J’aime la fierté de cet homme qui habillé de son uniforme pour défiler et qui est également drapé du drapeau de son syndicat. Elle est très représentative de ce que je voulais faire dès le départ avec cette série, fond flou et assombri pour mettre en avant le sujet principal avec une lumière douce.

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