Les 20 000 et cinq de Roanne
Jean-Paul, Cristel, Gérald, Didier, Christian et les autres… Nous étions 20 000, le 5 novembre, à soutenir les cinq de Roanne qui comparaissaient pour la 3e fois devant les tribunaux, 20 000 à contester cet acharnement antisyndical. Rappelons que le crime originel de ces syndicalistes de la CGT est d’avoir tagué, en 2010, un trottoir et un mur de slogans contre la réforme des retraites. Après une condamnation à 2 000 euros d’amende chacun et une inscription au casier qui signifiait pour les cinq fonctionnaires la révocation, un jugement en appel les dispensait de peine. Ils furent néanmoins convoqués en mai 2013 pour subir un prélèvement ADN qu’ils refusèrent. Nouvelle intimidation : la police fit irruption à l’aube à leur domicile, perquisitionna (!), les embarqua pour une garde à vue et le tout fut suivi d’un nouveau passage en correctionnelle, le 5 novembre. Verdict le 17 décembre prochain.
La volonté d’impressionner le mouvement syndical paraît d’autant plus manifeste que le cas des cinq de Roanne n’est pas isolé. Il fait écho à une cinquantaine d’autres selon la CGT, dont une poursuite pour distribution de tracts sur la voie publique, des mises en examen pour manifestations de soutien à un collègue licencié abusivement, etc. Sans parler du recours au FNAEG (fichier national des empreintes génétiques) créé à la suite de l’émotion suscitée par des crimes sexuels puis aménagé par Sarkozy dès 2003. Celui-ci élargit alors le fichier aux infractions mineures comme l’arrachage d’OGM, les tags etc. et permit d’y faire figurer les simples suspects. Un refus de prélèvement expose à une peine pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. A ce jour, 2 millions de personnes y figureraient dont 80% de présumés innocents. Un dispositif de classe qui s’inquiète des « dégradations » mais pas des casses d’usine et qui dans les 137 infractions répertoriées a « oublié » la délinquance financière.
Il ne faut pas s’étonner que la droite ait fait le boulot. Elle était au pouvoir pour ça. Mais on déplore qu’une gauche proclamée ne soit pas revenue sur un dispositif aussi scélérat que le FNAEG et se soit refusée « à entrer dans la logique de l’amnistie » de syndicalistes incriminés pour avoir seulement exercé des droits démocratiques. Les 20 000 qui se sont réunis autour des cinq de Roanne ont eux compris où était leur devoir. Nous serons encore plus nombreux la fois prochaine dans la rue pour défendre les nôtres.
Jean-Luc Bertet