Le Cri du Peuple • Assises des Maisons des potes, l’égalité c’est pour quand ?

« Que cent fleurs éclosent ! » Ce pourrait être le slogan de la Fédération nationale des Maisons des potes, qui se propose toujours de Faire de l’Egalité Une Réalité (Fleur). Les « Potes » tenaient leur université d’été – Assises de l’égalité – les 11, 12 et 13 juillet. Responsables politiques, acteurs associatifs, sociologues ont débattu devant et avec les militants réunis au siège de la CFDT dans le quartier populaire de Belleville à Paris. Le programme a beaucoup tourné sur la montée de l’extrême-droite mais aussi sur la situation des quartiers populaires 30 ans après la première marche pour l’égalité et contre le racisme, aussi connue comme la marche des Beurs.

assises de l’égalité

Après avoir assisté à leur précédente université d’automne, je voulais voir comment les choses avaient évolué, d’autant que je participe aux travaux de la toute nouvelle Commission Quartiers populaires du Parti de gauche. Il faut reconnaître à la « Fédé », longtemps considérée – à tort – comme une annexe du Parti socialiste, une cruelle lucidité, notamment sur la question des quartiers :

Un an après l’arrivée de la gauche au pouvoir la situation des habitants des quartiers populaires demeure très préoccupante. Ségrégation raciale, ségrégation sociale, chômage de masse, précarité économique, décrochage scolaire, violences sociales, replis identitaires, racisme, discriminations… Comment faire reculer tous ces fléaux sans prendre appui sur les forces sociales ? La gauche est impuissante à faire changer la société, si elle ne s’appuie pas sur le monde associatif, sur le monde militant pour faire reculer les injustices et construire de nouvelles solidarités.

Intervention Alexis Corbières
Alexis Corbière (gauche) intervient sur l’extrême-droite et la laïcité

L’absence de mesures fortes pour les quartiers placés en Zone urbaine sensible, le recul sur le droit de vote des étrangers extracommunautaires, le sentiment que la jeunesse des banlieues reste laissée pour compte des politiques publiques… alimentent le ressentiment parmi les militants de la Fédération nationale des Maisons des potes (FNMDP). Il en va de même sur l’anonymisation des demandes de logements sociaux qui avait pourtant été promise par le candidat Hollande. A titre individuel ou collectif, les « Potes » se revendiquent pourtant comme des ayant-droits de la victoire du candidat socialiste.

Et la déception est à l’ordre du jour. A l’image de ce jeune militant qui affiche clairement sa double appartenance FNMDP et Mouvement des jeunes socialistes et qui chante devant moi « un pas en avant, deux pas en arrière, c’est la politique de François Hollande ». Le café qu’il sirote a un goût amer bien qu’il ait été préparé avec soin par ses camarades. A la tribune, hors les propos convenus des parlementaires socialistes qui recommandent la patience, la teneur des propos est similaire. A l’image de Steevie Gustave, adjoint au maire de Brétigny (Essonne). Il explique avoir fait campagne pour François Hollande, sur le droit de vote des immigrés notamment, et se retrouver aujourd’hui en difficulté pour continuer à mobiliser les jeunes des quartiers de sa ville.

ah ces immigrés
Ah, ces immigrés qui font tourner notre économie…

Durant la double campagne électorale de 2012, la FNMDP avait mis en débat 11 propositions « pour faire de l’égalité une réalité », allant du renforcement du nombre d’enseignants en Zone d’éducation prioritaire à la construction de centres d’hébergement d’urgence pour les femmes victimes de violence, en passant par une taxe de 10 % sur les revenus du loto et du PMU pour financer les associations d’éducation populaire dans les quartiers. Un programme qui se veut pragmatique et concret pour répondre aux attentes de la jeunesse. Une jeunesse qui, depuis 30 ans, ne fait qu’attendre. En vain. Sauf à l’échelle locale, les actions concrètes en faveur des habitants des quartiers populaires n’ont jamais été une priorité pour les politiques publiques. Et les grandes annonces liées aux multiples réformes de la politique de la ville n’ont de commun que d’avoir oublié ces habitants, selon l’aveu dramatique du ministère de la Ville.

A l’issue de ce week-end studieux, marqué par des échanges parfois vifs, il reste un regret. Les « Potes » sont un peu restés entre eux. Malgré les invitations nombreuses, les militants des autres associations issues des quartiers populaires ou de partis politiques n’ont pas répondu à l’appel. Comme si, en matière de quartiers populaires, nous disposions de tellement de lieux d’échanges et de confrontations.

Le Parti de Gauche pour la gratuité des ponts et accès aux îles Oléron et Ré

Non au maintien ou rétablissement d’octrois pour accéder aux Iles de Ré et Oléron !

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Indépendamment des problèmes de transports et d’accès aux Iles de Ré et Oléron, d’environnement, sur lesquels il conviendra de travailler, pour le Parti de Gauche, la continuité territoriale entre Ré, Oléron et le continent doit être garantie gratuitement; la sélection par l’argent ne saurait être retenue, d’ailleurs les octrois ont été supprimés par la loi n° 379 du 2 juillet 1943, nous ne les laisserons pas être rétablis sous aucun prétexte.

Si des prises de positions politiques (J.F. FOUNTAINE, vice Président de la CDA, et S. ROYAL, Présidente de la Région Poitou Charentes), semblent indiquer que des lignes sont en train de bouger, il n’en demeure pas moins vrai que le pont étant payé, sa gratuité doit être assurée et que le pont d’Oléron ne saurait changer de statut comme cela a déjà été envisagé, en catimini.

C’est pour poursuivre ce combat que le Comité Ouest17 du Parti de Gauche, réuni le 10 juillet 2013 prends la position suivante :

Au nom de l’égalité des droits entre les citoyens, des principes de liberté de circulation sur le territoire et de la non-sélection par l’argent, le Comité défend la gratuité des ponts et des accès aux îles Oléron et Ré. Il considère que c’est à la puissance publique d’assumer l’entretien des voies publiques, le maintien des digues et du littoral.

L’intérêt général devant primer sur l’intérêt particulier, les questions de transports doivent être appréhendées dans un schéma global d’aménagement du territoire. C’est pourquoi, en même temps que la gratuité, le Comité défend un développement et un schéma global et cohérent du service public du transport. Le Comité défend en particulier une politique volontariste et cohérente de transports en commun entre les îles et sur tout le territoire.

Aussi, le Comité s’engage et milite avec les organisations politiques, associatives, syndicales et citoyennes pour la gratuité et la mise en œuvre de moyens publics de transport collectif à la place du tout routier et sans rupture de charge entre les différents modes de transport.

Parti de Gauche des Côtes d’Armor (22) • Bon 14 juillet 2013

Pérou • Rencontre avec le président de la République

J’ai rencontré le Président de la République et j’ai été impressionné par le niveau des réalisations sociales auquel le pays est parvenu en deux ans depuis la nouvelle présidence !
Je suis au Pérou.

En partant des besoins populaires la vie change profondément et la croissance est de six points. Avec la création d’une retraite pour tous ceux qui n’en avaient pas, avec l’attribution de milliers de bourses d’étude aux familles pauvres et le développement impétueux de l’accès aux soins, Ollanta Humala, le président du Pérou, fait vite et bien ce que le président d’un pays riche comme le nôtre se montre incapable de commencer.

Ici on ne se réjouit pas de l’existence des riches : on répare leurs dégâts en s’occupant des pauvres et en trouvant le chemin du développement humain de la société en dépit de toutes les difficultés.
Au lieu de leur interdire le survol de l’espace aérien français, François Hollande ferait mieux d’inviter les chefs d’état d’Amérique du sud à lui donner des conseils. Eux éradiquent la pauvreté lui la développe. Leur pays ne prennent plus de consigne à Washington. Et ils sont respectés pour cela.

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Intervention de François Hollande : C’est pas la fête, sauf pour les riches !

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François Hollande a commencé son intervention du 14 juillet en évoquant la catastrophe de Brétigny S/Orge. Il en a tiré la conclusion qu’il fallait donner la priorité aux lignes classiques et a célébré la nécessité d’un grand service public du ferroviaire.
Pourtant, on se souvient que le même, alors Président du Conseil Général de Corréze, appuyait l’option « barrau » TGV Paris Poitiers Limoges. Et que son parti vote au parlement européen la dérégulation du ferroviaire !
Si on suit cette logique ce sont autant d’erreurs que l’on rectifie par faute de les avoir commises ! Le Président de la République devrait en prendre de la graine pour changer à temps la politique d’austérité qui entraîne de façon certaine le pays à une autre catastrophe, celle de la récession.

Ce n’est malheureusement pas le cas. Le candidat du « changement c’est maintenant » a confirmé qu’il s’était mué en triste président de l’austérité. Sûrement aveuglé par le soleil parisien, Monsieur Irma a, comme il le fait depuis un an, expliqué que la « reprise est là ». Il est vrai que les critères sur lesquels s’appuie François Hollande sont confondants de bêtise : « je ne vais pas m’en plaindre (que les plus riches s’enrichissent), cela veut dire que l’économie est repartie ». Or, on observe à l’inverse depuis 2008 que les écarts de richesses ne cessent de s’accroître sans que cela n’implique le moindre bénéfice économique pour le plus grand nombre, bien au contraire.

Le Président de la République a également confirmé que la future réforme des retraites verrait immédiatement un augmentation de la durée de cotisation contrairement à ce qu’espérait son propre parti. Pour la première fois de l’histoire, un Président « de gauche » se prépare donc, dans les faits, à reculer l’âge de la retraite.

Ce 14 juillet n’avait donc rien d‘une fête révolutionnaire : il a été marqué par le cap maintenu sur une politique économique et sociale de droite ! C’est maintenant à la mobilisation sociale de lui répondre, dès la rentrée.

Catastrophe ferroviaire de Bretigny

Suite à la catastrophe ferroviaire en gare de Bretigny le 12 juilllet, dont le bilan provisoire est de 6 morts et une trentaine de blessés, nous adressons nos condoléances aux proches de celles et ceux qui ont perdu la vie et pensons aux nombreux blessés.

Il faut remonter au 27 juin 1988 et l’accident en gare de Lyon du RER D qui avait fait 56 morts pour retrouver un accident ferroviaire de cette ampleur. A l’époque la vétusté des installations et du matériel avait déjà été mise en cause.

Plus de 20 ans plus tard les mêmes questions se posent. Pourquoi le train Paris-Limoges transportant plus de 350 voyageurs a-t-il déraillé au passage d’une importante zone d’aiguille située en amont de la gare de Brétigny sur Orge ? Les conditions de transport répondent elles aux normes de sécurité ? Les investissements sur les installations et le matériel sont-ils à la hauteur des besoins sur cette ligne structurante pour l’aménagement du territoire ?

Les enquêtes en cours vont permettre de mieux cerner les circonstances de cet accident dramatique. Pour que toute la lumière soit faite, le Parti de Gauche estime nécessaire que les représentants des personnels des CHSCT soient associés à l’enquête en cours menée par l’opérateur … En effet, sans présager des résultats, le Parti de Gauche tient à rappeler que depuis de nombreuses années, personnels, élus, voyageurs alertent régulièrement sur la dégradation de la sécurité du système ferroviaire depuis la séparation entre d’un côté RFF (responsable des infrastructures) et de l’autre SNCF (responsable des matériels roulants) et le développement de plans « d’optimisations » c’est à dire d’économies qui ont touchés tous les secteurs y compris l’entretien et donc la sécurité !

D’ores et déjà le Parti de Gauche exige que l’on se penche enfin sur les conséquences désastreuses de la politique ferroviaire de libéralisation menée ces dernières années. Il faut faire le bilan de cette séparation absurde entre gestionnaire d’infrastructure et exploitant mais aussi de la privatisation rampante de la SNCF imposée par la commission européenne qui accompagne la négligence des pouvoirs publics en terme d’investissement sur les installations et le matériel. Cette politique imposée par l’objectif de rentabilité dans un système de la « concurrence libre et non faussée » doit cesser. Elle est contraire à l’intérêt général.

Pour ceux qui ont substitué le mot voyageur par celui de « client » comme le fait systématiquement le président de la SNCF, nous leur rappelons que nous ne sommes pas dupes. Ce changement n’est pas qu’un changement de vocabulaire. Il a entraîné un ensemble de changements où la rentabilité a primé sur la sécurité, ou les branches déficitaires ont souffert de lourds sous investissement au détriment de la mission de service public attendue par tous nos concitoyens ! Pour tout ceux-là qui pensent que la sécurité à un coût, nous rappelons surtout qu’elle n’a pas de prix !!

Vite, la répartition des richesses

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Le 12 juillet 2013, Le Plus sélectionne cet article et le publie sur son site. Vous pouvez retrouver cette publication en contexte ici.

Comme chaque année, le magazine Challenges vient de publier son classement des 500 Français les plus riches. Les chiffres sont édifiants : alors que l’immense majorité de la population subit de plein fouet les effets de la crise économique, nous apprenons que ces 500 Français se partagent à eux seuls 330 milliards d’euros (+25% par rapport à l’année dernière). 0,0008% de la population possède donc l’équivalent de 16% du PIB.

Bien sûr, je dis cela pour donner un ordre de grandeur et j’anticipe déjà les critiques des défenseurs des riches-qui-sont-vraiment-trop-taxés : je n’ignore pas que le PIB est un flux annuel qui doit être différencié du patrimoine. Ceci posé, je leur signale, au passage, qu’ils sont bien souvent les premiers à ramener la dette de l’État, dont la durée de vie moyenne est de 7 ans et 11 jours, au PIB (qui est annuel), histoire de faire pétocher un peu les gens sur le mode « il-va-falloir-se-serrer-la-ceinture-parce-que-la-dette-devient-intenable ». Mais d’accord, admettons, soyons justes avec les-riches-qui-n’en-peuvent-plus-du-niveau-de-l’imposition, et prenons d’autres chiffres : selon un article d’RMC, le patrimoine total de la France s’élevait en 2012 à 13 620 milliards d’euros ; si l’on utilise cette source, on peut donc calculer que 0,0008% de la population se partage 2,42% du patrimoine français. Ça fait quand même un sacré écart.

Vous n’êtes toujours pas convaincu ? Qu’à cela ne tienne, j’ai d’autres chiffres à vous donner qui datent, eux, de 2010 (vu qu’il n’y a pas eu de révolution fiscale depuis cette date, je gage que ces chiffres sont sensiblement identiques aujourd’hui). Parlons du revenu annuel : les 50% les plus pauvres de la population adulte se partagent 27% du revenu total (2 fois moins qu’en situation d’égalité réelle) alors que les 10% les plus riches se partagent 31% de cette somme (3 fois plus qu’en situation d’égalité réelle) ; parmi eux, les 1% les plus riches accaparent 11% du revenu total (11 fois plus qu’en situation d’égalité réelle). Sur le patrimoine, les écarts sont encore plus accablants : les 50% les plus pauvres possèdent 4% du patrimoine total (12,5 fois moins qu’en situation d’égalité réelle) alors que les 10% les plus riches se partagent 62% de cette valeur (6,2 fois plus qu’en situation d’égalité réelle) ; les 1% les plus riches accaparent, quant à eux, 24% du patrimoine total (24 fois plus qu’en situation d’égalité réelle).

A part ça, certains vous répètent en boucle que tous les problèmes de la France viennent de l’immigration (qui rapporte 12 milliards d’euros par an), de l’« assistanat » (encore une autre absurdité) ou encore de la fraude aux prestations à la Sécurité sociale (alors que l’immense majorité des fraudes est patronale : 15 milliards sur 17). Autant de mirages destinés à détourner vos yeux du vrai problème : la répartition des richesses.

Lire la suite sur le blog d’Antoine Léaument

Tarifs de l’énergie : les directives libérales contre l’écologie

Jeudi matin, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a demandé à l’État français d’annuler le tarif de rachat de l’électricité éolienne. Cette dernière a jugé le tarif comme étant une aide déguisée de l’État en faveur de l’éolien. Si cette décision était appliquée, elle entraînerait la mort du développement de cette source d’énergie renouvelable. C’est ce sort qui a eu raison de la filière solaire photovoltaïque en France. Nous ne pouvons l’accepter à nouveau.

Cela intervient la même semaine que l’annonce d’une augmentation de 5% du tarif de l’électricité pour les usagers cet été et de 5% l’année prochaine. Ces augmentations de tarifs sont inadmissibles et font encore reculer le pouvoir d’achat quand 10 millions de personnes en France souffrent de précarité énergétique.

La semaine est tristement révélatrice de la volonté de l’Europe Libérale d’écraser les ménages et des mensonges quant à ses intentions en faveur de la transition énergétique. Nous appelons le gouvernement à désobéir aux injonctions européennes en conservant le soutien apporté à la filière éolienne et en annulant les augmentations des tarifs de l’électricité.

Grèce • ERT, une chaîne en plus, une chaîne en moins

ERT2 Aujourd’hui, je vais vous apporter quelques bouffées de Grèce. Je suis arrivé hier matin à Athènes par le tout premier avion, discrimination tarifaire oblige. Me voilà donc débarqué en Grèce plusieurs heures avant l’ouverture du premier Congrès de Syriza, où je représente le Parti de Gauche mais tente également dans le temps qui me reste de vous apporter un écho en retour. Cette arrivée anticipée était une excellente occasion de visiter l’ERT, la radio télévision publique fermée par le gouvernement austéritaire, qui continue à fonctionner comme une sorte de « coopérative ouvrière de production » audiovisuelle. Cette décision prise pour satisfaire les exigences de la Troïka en « économisant » 2000 postes de fonctionnaires mais déclarée illégale par le Conseil d’Etat m’avait frappée tant elle montre le caractère austéritaire des politiques menées dans et par l’Union européenne. Comme l’ont noté de nombreux Grecs, même la dictature n’avait pas interrompu les programmes !

La presse française a donné à cet épisode un large écho, unanimement indigné. Tant mieux. Cela nous fut utile. Le scandale conduisit plusieurs sommités solfériniennes à exprimer pour la première fois une divergence avec ce gouvernement dans lequel siègent leurs amis du PASOK (enfin ce qu’il en reste). Pour autant, je ne suis pas naïf. Je sais bien que le corporatisme journalistique fut le premier moteur de cet intérêt subit. En Grèce en ce moment, sans que cela émeuve nos médias officiels défenseurs autoproclamés des droits de l’homme, des milliers de personnes meurent faute des soins dont elles ont un besoin plus vital que de télévision. Mais la fermeture d’une chaîne fait davantage parler dans les rédactions que celle d’un hôpital pour la raison que les journalistes s’intéressent davantage à eux-mêmes qu’aux personnels infirmiers. Je suis raisonnable, je n’attends pas de la corporation qu’elle renonce à sa fascination pour elle-même. J’aimerais juste qu’elle s’intéresse un peu au sort des autres. Je parle bien de la corporation. C’est-à-dire des journalistes comme rouages d’un système et non comme les consciences individuelles qu’ils ne cessent jamais d’être en puissance. Je le crois possible dans certaines situations vraiment exceptionnelles. Comme celle d’ERT. C’est ce que j’ai cherché à vérifier sur place. Je voulais voir si les journalistes et techniciens en lutte se contentaient de continuer à émettre la même chaîne dans l’indifférence vis-à-vis des souffrances des autres ou s’ils avaient modifié le contenu des programmes voire la manière de les définir.

Un journaliste d’ERT me répondit sans le savoir par une formule qui résuma en un instant le basculement qui s’est produit et la manière dont un acteur engagé dans le processus se le représente. Autrefois nous avions une chaîne d’Etat me dit-il. Maintenant nous avons une chaîne publique. L’ERT d’avant servait le gouvernement et donc les austéritaires. Elle le faisait servilement en maintenant le couvercle sur les résultats désastreux de leurs politiques comme sur les luttes qui les contestaient. D’ailleurs les Grecs ne nous aimaient pas me dit-il avec le sourire d’un homme qui s’est libéré d’un poids. Pour lui chaîne d’Etat signifiait coups de téléphones pour influer sur les programmes. Et le principal problème c’est que tout le monde le savait. Chacun comprenait donc que la télévision d’Etat n’était pas le miroir objectif qu’elle prétendait être.

L’ERT d’aujourd’hui doit en revanche sa survie à ce que mon interlocuteur appelle « la société » et que nous appellerions le peuple. Sans une présence populaire massive autour du siège d’ERT à Athènes, le bâtiment aurait été évacué comme l’ont été toutes les antennes locales que le peuple grec laissa exposées. Dès lors, ERT se considère comme au service de la société. Celle-ci le lui rend bien. L’audience est passée de 8 à 35% malgré la fermeture de l’émetteur qui dessert Athènes et sa région. Sans cela, ce serait 60% me dit-on. ERT a eu la semaine dernière 2 millions de téléspectateurs sur Internet, soit l’équivalent de 12 millions de personnes si l’on rapporte ce chiffre à la population française.

De fait la grille des programmes a été totalement bouleversée. ERT parle désormais éducation, santé, travail. Elle le fait en invitant les citoyens concernés par ces secteurs et donc en donnant la parole aux luttes qui se multiplient dans le pays. La chaîne fait davantage la place à des émissions en plateau et sur ces plateaux elle recherche un pluralisme qui ne se limite pas à inviter la diversité des forces politiques mais donne la parole aux forces sociales qui n’accédaient jamais à la lumière audiovisuelle. Du coup des thèmes occultés font leur apparition. Par exemple, ERT a réalisé 5 émissions sur une question jamais débattue avant sur les ondes : la privatisation programmée de l’eau à Athènes, avec la participation de nombreux scientifiques. Vous noterez au passage qu’en cherchant à faire émerger les questions fondamentales de la société et en voulant donner aux citoyens les moyens de se faire leur propre opinion (la nouvelle ERT tient à être une chaîne ouverte et pluraliste, pas une chaîne militante dans le sens étroit que peut revêtir ce terme), ERT a explosé les formats traditionnels. Cinq émissions sur le même sujet, cela n’existe pas sur nos chaînes où règne la dictature du news-zapping ou alors les cadres formatés du série-making. De même, la chaîne a redécouvert les formats longs.

Les contraintes qu’implique l’hostilité gouvernementale ont entraîné d’autres changements. Les grévistes n’ont aucun moyen financier. En conséquence la nouvelle ERT ne peut plus acheter des programmes sur le marché national ou mondial. Mais ERT reçoit désormais des productions libres de droit proposées de manière solidaire. Elle diffuse dès lors des documentaires ou des créations artistiques qui n’accédaient jamais aux médias officiels. De plus, si elle contrôle le siège de la chaîne et plusieurs antennes régionales. la nouvelle ERT rencontre de multiples difficultés dès qu’elle envoie des équipes à l’extérieur. Les journalistes et techniciens sont en effet harcelés de procès-verbaux policiers censés démontrer qu’ils font un usage illégal des voitures ou caméras de la chaîne. C’est pourquoi ils font appel à des images envoyés par des citoyens ce qui les amène à expérimenter des formes de coproduction participative non imaginées au départ. De même, les journalistes entrent en contact avec des citoyens mobilisés à l’occasion des rassemblements qui se tiennent tous les soirs, où se produisent bénévolement de nombreux artistes, et qui sont diffusés sur la chaîne.

Le reproche de détourner les biens publics a pris le jour où j’étais là un tour particulièrement grotesque. Hier les salariés licenciés d’ERT ont en effet eu l surprise de voir diffusé sur le canal de leur chaîne une mire censée accréditer l’existence d’une nouvelle télévision baptisée « Télévision Publique Grecque ». Il faut savoir que la décision gouvernementale de fermer ERT a été invalidée par le Conseil d’Etat. Le gouvernement a donc fait mine de réouvrir la télévision publique pour se mettre en règle. Une loi a été votée en ce sens qui ne dit mot des radios que coiffait ERT, ne dit rien non plus du nombre de chaînes qui émettrait à l’avenir, et pas davantage sur ce que serait leur contenu. L’objectif du gouvernement est de justifier la fermeture autoritaire d’ERT et sans doute de permettre de nouvelles actions contre la chaîne entrée en résistance. Seule manifestation d’existence de cette nouvelle chaîne, ce signal soudain est diffusé par… les émetteurs qui appartiennent au consortium des chaînes privés du pays ! Les premiers programmes de cette nouvelle chaîne d’Etat doivent de même d’après des fuites être tournées dans les studios de la principale chaîne privée, Mega. Donc pendant que la chaîne publique ERT se voit reprochée l’utilisation des moyens de l’Etat, la future chaîne d’Etat utilise, elle, sans vergogne les moyens du privé…

Comment les programmes de la nouvelle ERT sont-ils définis ? Lors de l’Assemblée générale des salariés qui se tient chaque jour. Les grilles sont faites la veille pour le lendemain. Ensuite chaque équipe jouit d’une grande autonomie pour construire son émission. En théorie l’organigramme de la chaîne n’a pas été redéfini. En réalité, il faut pallier à l’absence de ceux qui ne viennent plus depuis la décision de fermeture et le licenciement de tous les salariés. Si les hiérarchies ont été conservées, elles fonctionnent aussi d’une manière plus collective. Dans les faits, je me réunis avec le gars qui est au-dessus de moi et celui qui est en dessous et nous décidons ensemble m’explique l’un des responsables de la radio. Dans cette révolution citoyenne, le pouvoir est à ceux qui font, mais il ne s’exerce légitimement que dans la mesure où il a été discuté, que ce soit dans l’AG quotidienne ou dans les collectifs de travail qui jouissent de manière autonome de la part d’initiative qui leur est déléguée. Privé de soutien populaire, le gouvernement pèse lui sur la chaîne… via le soutien que lui apportent les actionnaires du secteur privé. S’il a pu fermer le signal digital d’ERT, c’est parce que celui-passait par des installations de la société de téléphonie OTE… privatisée et vendue à Deutsche Telekom !

On voit comment le cas d’ERT illustre la manière dont les vieilles questions de l’implication populaire, du contrôle et de la propriété s’appliquent aux réseaux de télécommunication si stratégiques à notre époque. La manière dont ERT est devenue la lutte des luttes, cristallisant les mobilisations survenues dans tous les secteurs de la société, montre aussi comment les luttes sociales sont indissociablement des luttes pour la représentation dans l’espace public. C’est pourquoi la question des médias est directement politique. C’est pourquoi elle est centrale dans tous les processus concrets de révolution citoyenne que nous avons sous les yeux. Alexis Tsipras, le jeune président du groupe parlementaire de Siriza, y est d’ailleurs revenu dans son discours d’ouverture. Mais ceci est une autre histoire que je vous conterai demain si le temps m’en est laissé.

Cet article est paru sur le blog de françois Delapierre, sous le titre : ERT, une chaîne en plus, une chaîne en moins

Hélas, la xénophobie et le racisme ne prennent pas de vacances

Laïcité

Alors que le FN se sent pousser des ailes, une bonne partie de l’UMP se lance dans une course à celui qui sera le plus anti gens du voyage et à celui qui manipulera le plus la laïcité pour ne viser qu’une religion, l’islam. On a d’abord eu les déclarations de Le Pen père qui n’est jamais en reste pour les formules haineuses contre tous ceux qui pour lui doivent être exclus du peuple français. Christian Estrosi, député-maire UMP de Nice, ayant peur pour sa réélection, fait dans la surenchère sinistre et appelle les élus à la chasse aux gens du voyage. Immédiatement d’autres élus UMP se sont engouffrés dans la brèche pendant que le ministère de l’intérieur continuait de son côté les annonces de démantèlement de camps roms. Mais dans ses déclarations, C. Estrosi avait aussi mené la charge contre l’islam, accusé d’être incompatible avec la laïcité à la lumière des évènements d’Égypte. Aucun média n’a voulu retenir cette partie de ses propos. Il est pourtant invraisemblable d’accuser globalement une religion au nom de ce qui se passe dans un pays.

Or aujourd’hui justement en Égypte, en Tunisie, en Turquie des milliers de citoyens se lèvent contre l’obscurantisme religieux et risquent leur vie pour défendre le droit à la liberté de conscience et d’expression. Cela montre que cette aspiration à l’émancipation est universelle, contrairement à toutes celles et ceux qui essaient de nous faire croire qu’il y aurait une spécificité occidentale, comme si d’ailleurs l’intégrisme religieux dans toutes les religions sans exception n’essayait pas d’imposer ses dogmes et ses normes de vie à l’ensemble des sociétés. Les mêmes qui vocifèrent contre l’islam, ne sont pas les derniers à vouloir imposer la notion de racines chrétiennes de la France. Pour le PG, la laïcité ne dépend pas de la religion, elle s’impose à toutes. La laïcité ne peut pas et ne doit pas être à géométrie variable. Le racisme est odieux quel que soit le visage derrière lequel il essaie de se cacher.

Aussi de la même façon que nous défendons sans relâche la laïcité contre celles et ceux qui cherchent régulièrement à en réduire la portée, nous continuerons à dénoncer celles et ceux qui la détournent dans un but raciste.

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