Le ridicule tue

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Une fois de plus le gouvernement solférinien, par la voix de sa ministre de la Santé, Marisol Touraine, fait payer au citoyen sa furie austéritaire: 2.4 milliards d’économies à réaliser sur le budget de
l’assurance-maladie: un « effort historique », s’extasie la ministre.

Mais le prix à payer pour les malades sera lui aussi très lourd: ce sont en effet les hôpitaux publics qui vont devoir assumer une bonne part de ces (énièmes) coupes budgétaires drastiques (près de 450 millions d’euros), alors même qu’ils sont déjà exsangues et en sous-effectif chronique du fait des
multiples réformes néo-libérales engagées depuis une dizaine d’années.

Ce seront donc les citoyens les plus précaires et les moins couverts qui en feront directement les frais, à travers notamment le développement de la chirurgie ambulatoire, dont l’effet le plus notable est l’aggravation de l’état de santé de la personne à moyen et long terme.

Pis, pour la première fois dans l’histoire, la médecine de ville, essentiellement libérale, se voit mieux dotée financièrement que l’hôpital (81 contre 75 milliards d’euros), à la plus grande satisfaction de l’ensemble des syndicats de médecins libéraux.

La seule mesure un tant soit peu positive pour les assurés, à savoir la généralisation du tiers-payant, devra attendre 2017 pour être effective, soit 4 longues années pendant lesquelles les patients devront retarder ou renoncer à des soins, faute de pouvoir avancer les frais. En attendant, les dépassements d’honoraires continuent d’augmenter.

Si d’ordinaire le ridicule ne tue pas, cette vision purement comptable de l’assurance maladie et de la politique de santé risque malheureusement d’avoir un impact désastreux sur la santé de nos concitoyens, notamment les plus précaires, et d’aggraver encore un peu plus les effets tout
aussi dramatiques de la politique austéritaire menée par l’actuel gouvernement.

La casse de la protection sociale, à travers toutes les mesures prises ces dernières années, poursuit un seul but : mettre la Sécurité Sociale en faillite pour mieux la privatiser. La Sécurité Sociale est en réalité loin d’avoir le trou financier qu’on veut bien lui imputer.

Le Parti de Gauche s’oppose à la Ministre actuelle et à sa conception de la santé comme un « Business ». Nous défendons plus que jamais un système de santé répondant au cahier des charges de l’OMS.

Le mélange des genres a démontré son incapacité à assurer la santé de tous sur un pied d’égalité et, par conséquent, nous prescrivons la suppression de tout monopole privé en matière de santé ( médicament, informatique, assurance, gros équipement …).

 

55 ans de la Constitution de 1958: Vite, la 6ème République!

Alors qu’il n’avait pas daigné se présenter aux célébrations des 220 ans de la République le 21 septembre 2012, François Hollande s’est aisément complu à fêter la 5ème République dans le cadre organisé par la vieille droite chiraquienne.

Dans ce rassemblement de vieux schnocks qui s’accrochent à la 5ème République comme une moule à son rocher, Hollande a déclaré qu’il n’avait jamais été favorable à la 6ème République.

Sans rire, Hollande a rappelé le principe de souveraineté populaire en vertu duquel les élus rendent des comptes aux citoyens. Nul n’ignore que justement, en 5ème République, le Président ne rend de comptes à personne.

Reconnaissant que le quinquennat avec accordé au Président trop de pouvoir dans l’exécutif, aucune des propositions qu’il formule n’est de nature à retirer du pouvoir au Président. Au contraire, il propose que le Parlement édicte moins de lois!

Ce spectacle de régime à bout de souffle ne change rien à la réalité. Le principe de souveraineté populaire dans une démocratie moderne passe par la révocabilité des élus. Le peuple l’obtiendra via une Assemblée Constituante qui construira démocratiquement la 6ème République.

Aide juridictionnelle: soutien aux avocat-e-s en grève !

Une fois de plus, les droits des plus pauvres sont la variable d’ajustement budgétaire du gouvernement. En contrepartie de la suppression de la taxe de 35 euros pour saisir la justice, instaurée sous la droite, il est prévu dans la prochaine loi de finances une baisse de 10% du budget de l’aide juridictionnelle! 900 000 justiciables en matière familiale, civile ou encore pénale (mis en cause ou plaignant-e-s), gagnant moins de 900 euros par mois en feraient les frais. Il est également prévu de mettre fin au système actuel de péréquation entre barreaux selon le taux d’affaires prises en aide juridictionnelle.

Le Parti de Gauche soutient sans réserve les avocat-e-s qui, dès aujourd’hui à Marseille et à partir de demain dans toute la France, seront en grève pour défendre le droit des plus pauvres à être défendu-e-s en justice.

PSA : les 7 grévistes ne lâchent rien !

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Malgré le difficile combat engagé par les salariés en grève de la faim, malgré leur grave affaiblissement après 14 jours de grève, la direction de PSA ne veut toujours pas entendre les exigences des syndicalistes et refuse de prendre en compte leurs revendications, niant ainsi qu’il y aurait des problèmes au sein du site de Poissy.

C’est pourquoi demain jeudi 3 octobre à 16 heures, afin d’amener la direction à entrer dans des négociations raisonnées, les salariés appellent à se rassembler devant le siège de PSA Poissy, Boulevard de l’Europe, devant le piquet de grève, afin de continuer à les soutenir et amener la direction à changer de comportement.

Ils ne font rien d’autre qu’exiger l’égalité et le respect des droits au sein de l’entreprise, le respect de pouvoir exercer leur mandat comme toute organisation syndicale devrait pouvoir le faire et la fin du harcèlement moral, comme l’a toujours défendu le Parti de Gauche en exigeant la loi d’amnistie des syndicalistes et des acteurs du mouvement social. Aujourd’hui, le seul reproche que la direction peut leur faire, c’est bien celles de faire acte de résistance et de dignité.

Le parti de gauche sera présent lors de ce rassemblement. Laurence Sauvage, secrétaire nationale en charge des luttes sera accompagnée de Philippe Juraver, membre du bureau national et de Jean-Michel Mespoulède, animateur du Front des luttes.

 

L’Humanité • Manuel, souviens-t-en…

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« Quand on est de gauche, on n’a pas la matraque en guise de cœur. C’est un Français d’origine manouche qui t’écrit et qui écrit au Français de fraîche date que tu es. C’est un fils de «brigadiste» qui se rappelle à toi. Souviens-t’en: «Celui qui n’a pas de mémoire n’a pas d’avenir.» Par Jean-Claude Lefort, Député honoraire, Fils de Manouche.

La tribune:

Manuel, tu as déclaré hier soir, sur BFMTV, que la situation était très différente pour toi, relativement à celle des Roms, car ta famille espagnole était venue en France pour fuir le franquisme.

Tu as été naturalisé français en 1982. Franco est mort en 1975. Sept ans avant ta naturalisation. Quand tu es devenu français, il n’y avait donc plus de dictature en Espagne. Tu avais donc « vocation », selon tes mots, à retourner dans ton pays de naissance, en Espagne. Tu ne l’as pas fait et je comprends parfaitement, de même que je comprends totalement ton souhait de devenir français. Cela sans l’ombre d’un doute.

Tu avais «vocation» à retourner à Barcelone, en Espagne où tu es né, pour reprendre tes propos qui concernaient uniquement les Roms. Celui qui t’écrit, en ce moment, est un Français d’origine manouche par son père. Mon père, manouche et français, est allé en 1936 en
 Espagne pour combattre le franquisme, les armes à la main, dans les Brigades internationales. Pour la liberté de ton pays de naissance, et donc celle de ta famille. Il en est mort (1), Manuel. Des suites des blessures infligées par les franquistes sur le front de la Jarama, en 1937. Je ne te demande aucun remerciement, ni certainement pas la moindre compassion. Je la récuse par avance. Je suis honoré en vérité qu’il ait fait ce choix, quand bien même il a privé ma famille de sa présence alors que je n’avais que neuf ans et ma sœur, dix-huit.

La guerre mondiale est venue. Et les camps nazis se sont aussi ouverts aux Tziganes. Tu le sais. Mais un nombre énorme de Manouches, de Gitans et d’Espagnols se sont engagés dans la Résistance sur le sol français. Ton père aurait pu en être. Il en avait l’âge puisque il est né en 1923. Georges Séguy et d’autres sont entrés en résistance à seize ans. Je ne lui reproche aucunement de ne pas l’avoir fait, bien évidemment. Mais je te demande le respect absolu pour celles et ceux qui se sont engagés dans la Résistance contre le franquisme, puis ensuite contre le nazisme et le fascisme. Contre ceux qui avaient fait Guernica. Et pourtant, à te suivre, ils avaient «vocation» à retourner ou à rester dans leur pays d’origine, ces «étrangers, et nos frères pourtant»…

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Utiliser les marges de manoeuvres de la PAC pour soutenir l’agriculture

UTILISER LES MARGES DE MANŒUVRE NATIONALES DE LA PAC POUR SOUTENIR L’AGRICULTURE PAYSANNE ET ECOLOGIQUE

Dans le cadre des concertations avec les organisations agricoles pour décliner au niveau national l’accord européen sur la PAC décidé en juin dernier, le gouvernement propose 4 scénarios qui apparaissent bien insuffisants, même si le 3ème permettrait une certaine redistribution des soutiens.

En juin dernier, l’accord européen sur la réforme de la PAC, avait pour but d’insérer durablement l’agriculture européenne dans des échanges internationaux complètement libéralisés. En aucun cas cet accord ne permet de redéfinir un réel projet européen au service de la souveraineté alimentaire et de la transition écologique de l’agriculture.

Le Front de Gauche s’inscrit en faveur de plusieurs leviers de la PAC mobilisables au niveau national : faire « converger » totalement les « aides directes » dites « de base » pour diminuer les inégalités de soutiens entre agriculteurs ; doter davantage les petites exploitations en utilisant à plein le paiement dit « redistributif » ; utiliser le recouplage partiel des aides directes (15% des aides) pour soutenir les secteurs en difficulté (élevage ruminant, notamment ovin, caprin et bovin allaitant ; fruits et légumes) et relancer la production de plantes riches en protéines (légumineuses) ; favoriser l’installation d’agriculteurs en les accompagnant vers des pratiques agro-écologiques avec des aides incitatives ; mettre en place un paiement vert, beaucoup plus contraignant, pour rémunérer véritablement les pratiques agricoles respectueuses de l’environnement (élevage à l’herbe, agroforesterie, cultures de légumineuses…). Dans le cadre de la politique de développement rural, il faut dégager un financement important pour les mesures agro-environnementales afin de cibler les agriculteurs qui s’engagent dans des systèmes de production agroécologiques et pour les mesures qui permettent de structurer les filières courtes et de proximité.

Les différents scénarios proposés par le gouvernement manquent d’ambitions pour refonder la PAC et atteindre les objectifs de redistribution des aides et de transition écologique. Le scénario 3 va dans le bon sens (convergence totale des aides de base d’ici 2019, paiement redistributif pour les 52 premiers hectares), mais reste insuffisant.

Le Front de gauche appelle le gouvernement à faire preuve d’indépendance par rapport aux lobbys de l’agro-business. Le Front de gauche continuera à se battre pour une nouvelle PAC basée sur une régulation des prix et marchés agricoles et une redistribution du soutien, au profit de l’emploi et de la transition écologique de l’agriculture.

Xavier Compain, Laurent Levard

Travail le dimanche • « Pour ou contre le travail le dimanche » : débat sur Europe 1 avec François Delapierre

Le 30 septembre, François Delapierre, secrétaire national du Parti de Gauche était sur Europe 1 pour débattre sur la question « Pour ou contre le travail le dimanche ? », au côté de Claude Boulle, Président de l’Union du Commerce de Centre-Ville, Joseph Thouvenel, de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) et Axel de Tarlé, d’Europe 1.

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Conférence environnementale • Pédalo et rétropédalage

Hulocogie - hollande pédalo Biodiversité marine, éducation à l’environnement, économie circulaire, emplois et transition écologique il y avait matière intéressante lors de la deuxième conférence environnementale du gouvernement des 20-21 septembre. Las, ces sujets n’ont fait l’objet d’aucun engagement, rien sur la santé au grand dam des associations qui en ont été écartées, aucun débat de fond lors des tables rondes, une fiscalité écologique aux contours toujours plus flous… On ne peut pas dire que la conférence environnementale ait fait beaucoup d’heureux, Greenpeace va jusqu’à parler de « recul faramineux ». Il n’y a guère que Pascal Durand et les dirigeants d’EELV pour être soulagés : l’annonce de M. Hollande de réduire le taux de TVA de 10% à 5% pour les travaux d’isolation thermique permet aux Ministres d’agiter un trophée et de justifier leur participation au gouvernement… Jusqu’au prochain psychodrame au vote du budget 2014 ? Pour Noël Mamère, ce sont « de grands discours qui visent simplement à permettre à certains de mes amis écologistes de dire « on reste au gouvernement ». Le président de la République distribue quelques médailles en chocolat. ». Difficile de mieux dire.

Promesses oubliées

Car cette réduction de TVA ne permet pas de camoufler les reculs de cette conférence environnementale. Sur tous les sujets « prioritaires » de l’année dernière : gaz de schiste, fiscalité écologique, diplomatie environnementale, énergies renouvelables, transport, agriculture biologique, tout est au point mort. Aucune annonce n’a été tenue en dehors du moratoire sur les OGM qui résiste encore malgré les coups de boutoirs des multinationales appuyées par Bruxelles. Quant à la grande loi historique sur la transition énergétique qui devait être « présentée devant le parlement avant l’été 2013 », elle « pourrait » l’être, selon le Président de la République, avant la fin 2014. Toujours un coup d’avance, M. Hollande !

Réduire notre consommation d’énergie de 50% en 2050, réduire de 30% la part des énergies fossiles en 2030, voici les nouveaux objectifs du gouvernement. Ambitieux certes. Pour y parvenir, en revanche, pas de feuille de route. Juste quelques grands principes : la rénovation thermique des logements anciens, le développement des voitures électriques et la relance des énergies renouvelables. Cohérence gouvernementale ? Le plan bâtiment de la Ministre Duflot ne contiendrait pas non plus d’objectifs de gain énergétique. Tout ceci ressemble fort aux bonnes vieilles techniques des négociations internationales sur le climat : des objectifs ambitieux à très long terme, mais non chiffrés et sans mécanismes contraignants.

Le grand flou taxe carbone

En matière de fiscalité écologique, on a assisté à de beaux effets d’annonce. Aucun n’arrive cependant à la cheville des 20 milliards de crédits impôt compétitivité offerts au patronat.

Pour financer la transition énergétique, le Premier ministre a annoncé de nouvelles recettes fiscales, à hauteur de 2,5 milliards d’euros en 2015. Rebaptisant la « taxe carbone » décidément devenue trop impopulaire en « contribution climat énergie », il n’a en revanche toujours pas précisé ses contours. A croire qu’il suffisait de prononcer le mot magique, la contribution climat énergie étant la dernière ligne rouge en date fixée par la direction d’EELV. On sait simplement qu’elle sera « progressive » et « compensée par des baisses de prélèvement obligatoires ». On nous promet des précisions lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2014. Les Ministres semblent bien peu au courant eux-mêmes. Tout le monde y perd son latin : la TVA sur les engrais augmente, Stéphane le Foll s’embrouille à la radio. Interrogée sur cette contribution climat, Cécile Duflot à la langue pourtant d’ordinaire bien pendue, bafouille aux micros, et nul ne parvient au final à expliquer aux Français en quoi va consister cette fiscalité dite verte. Sur quoi va-t-elle porter, quelle assiette, quel taux, quelles mesures compensatoires pour les plus pauvres ? Seule surprise, dans son discours de clôture le Premier ministre a annoncé que l’industrie nucléaire serait mise à contribution. Sans préciser de quelle manière.

Nucléaire, poids lourds : circulez, y a rien à voir

blog_-bateau_ivre_sauf_pedalo.jpg Parlons de nucléaire, justement. Le seul moment d’espoir dans le discours de M. Hollande est venu d’un lapsus. Le Président de la République a annoncé vouloir « réduire la part du nucléaire de 50% d’ici 2025 ». Las, il fallait bien comprendre « réduire la part du nucléaire [de 75%] à 50% » de l’électricité produite. Soit toujours le même objectif, et toujours pas de calendrier pour y parvenir. M. Hollande s’est borné à annoncer le « plafonnement de notre capacité nucléaire à son niveau actuel », ce qui peut signifier au choix de 0 à 100%. Le nucléaire a de beaux jours devant lui, même si le chef de l’État semble avoir tout d’un coup réalisé qu’il pouvait imposer la fermeture de Fessenheim par la loi. Mieux vaut tard que jamais, mais à ce rythme il devient de moins en moins crédible que la fermeture puisse se faire en 2016 comme promis.

Enfin la taxe poids lourds a de nouveau été reportée, venant ainsi allonger l’interminable liste des serpents de mer des promesses gouvernementales. Et plus un mot de la taxe carbone aux frontières que M. Hollande semblait un moment envisager pour entraîner les autres pays européens.

La décentralisation en embuscade

Cela a été peu relevé par les médias, mais M. Hollande en a aussi profité pour rappeler le futur rôle de chef de file des Régions en matière énergétique, avec la création d’un fonds de garantie avec la Caisse des Dépôts permettant des avances via un opérateur tiers régional et le « droit à l’expérimentation ». Il faisait ainsi référence à la loi de décentralisation à venir. Cela pourrait être une bonne chose, si toutefois on en savait plus sur l’articulation avec le rôle de planificateur et de garant de l’égalité des droits de l’État. Malheureusement, loin d’aller vers une planification écologique, il semble bien que la volonté du gouvernement soit plutôt d’aller vers une régionalisation des politiques énergétiques. Couplé à l’annonce d’une privatisation accrue d’EDF et de GDF, cela n’augure rien de bon et soulève de sérieux doutes sur la capacité à mener des politiques publiques de transition énergétique !

Le vernis écolo s’écaille

Pour le Président et le Premier Ministre, ces deux jours ont donc été un oral de rattrapage fait de discours flous, rajoutant de nouvelles promesses à la longue liste des renoncements. Celles-ci seront-elles tenues ? On peut en douter. Déjà, face aux réactions du patronat, ce premier recul du Président de la République sonne comme un aveu : « Ce n’est pas un dogme, il faudra adapter cette perspective à la croissance. Si nous faisons un peu moins, ce ne sera pas une calamité. » Politique de l’offre et austérité, affichage du « ras le bol fiscal » et « coût du travail », privatisations et soumissions aux diktats de l’Union européenne… La bifurcation écologique ne peut être dissociée des politiques économiques et sociales. Le gouvernement, lui, ne change pas de trajectoire.

29 septembre 1933

Papins.jpeg En février 1933, un fait divers sans précédent éclate dans la bonne société du Mans. Deux domestiques, Christine Papin et sa sœur Léa, assassinent leurs patronnes, Germaine Lancelin et sa fille Geneviève. Sauvagerie, violence, atrocité, barbarie. Les mots se bousculent dans la presse. Les coupables avouent. Oui, elles ont tué. Oui, elles se sont acharnées sur les corps. Oui, elles ont nettoyé la maison après le crime. Parce que c’est ainsi qu’on fait. Parce que c’est leur travail, après tout. Il faut que tout soit « propre ». Alors, elles ont nettoyé… Le mobile ? Elles ne savent pas. Elles ne savent plus. La patronne s’est montrée menaçante, pour un fer à repasser en panne. Peut-être. Ou pas.

Dans la bourgeoisie de ces années-là, les patrons ne sont pas toujours bienveillants pour leurs employés. Certains méprisent, d’autres soupçonnent, épient, comptent et recomptent les fruits, les couverts, la monnaie, pèsent le beurre et le fromage. Comment vivent les bonnes dans des maisons où rien n’est fait pour elles ? On met un chapeau pour aller à l’église le dimanche, mais est-on une « dame » pour autant ? En a-t-on oublié les humiliations répétées, les brimades accumulées et l’enfance sordide entre alcool, inceste, suicides et placements successifs ? Et pour autant, rien n’excuse un meurtre.

Les intellectuels, les surréalistes s’emparent du drame. Lacan en fait un cas d’école. Les uns hurlent à la mort, les autres à la transgression géniale. Et la presse, nationale ou locale, a tôt fait de rejeter les deux sœurs hors de la communauté humaine. Pourtant, l’Humanité dénonce l’exploitation ouvrière, l’esclavage moderne bien à l’abri dans l’office des grandes maisons, et dit, en un mot, la lutte des classes.

En septembre, le procès s’ouvre. Procès expédié. Christine, donnée comme incitatrice du crime, et qui en a pris la responsabilité au cours de l’été pour sauver sa sœur, est condamnée à la guillotine. Léa à 10 ans de travaux forcés. Le président de la République va gracier l’ainée. Preuve s’il en fallait que les interrogations existent. Et malgré toutes les interprétations artistiques qui en ont été faites, 80 ans plus tard, elles demeurent…

A propos des « Fusillés pour l’exemple »

Mémorial

J’ai été invité demain à la remise officielle du rapport de la mission du Centenaire de la guerre de 1914-1918 présidée par l’historien Antoine Prost, au ministre chargé des anciens combattants. J’irai, même si j’ignore ce que contient ce rapport, tout en n’ayant aucun doute sur le sérieux du travail du grand historien qu’est M. Prost. Et, je ne connais aucune des conclusions ni préconisations qui seront proposées au gouvernement. Il y a quelques mois, lors de la rédaction de ce rapport, le Parti de gauche, comme d’autres formations politiques, avait été sollicité et j’ai été auditionné, avec mon camarade Pierre Yves Legras, notamment par les deux historiens Nicolas Offenstadt et André Loez sur notre position au sujet des « fusillés pour l’exemple ». Cet échange fut d’une grande richesse, puisqu’ils sont tous les deux parmi les meilleurs experts de la question. Longtemps mené, au lendemain de la guerre, par les organisations traditionnelles du mouvement ouvrier et par des associations comme la LDH ou la Libre Pensée, le combat pour la réhabilitation de ces fusillés a grandement avancé ces dernières années. Il semble que François Hollande veuille même faire quelques déclarations sur le sujet le 11 novembre prochain. Dans l’attente d’y voir plus clair, je publie les notes qui ont constitué le cadre de notre déclaration devant les membres de la commission. Une nouvelle fois, merci encore à mon ami Pierre Yves, qui a passé l’été à lire les précieux travaux du Général André Bach et qui a joué un rôle essentiel dans notre réflexion.

Fusillés pour l’exemple Déclaration devant la commission :

Le Parti de Gauche accorde dans son action politique une place centrale à la question de la bataille idéologique. A ce titre, nous prenons l’histoire et les tentatives d’instrumentalisation dont elle fait l’objet au sérieux. Nous nous sommes déjà mobilisés face aux entreprises de manipulations de l’histoire venues de l’extrême droite, spécialement du FN, mais aussi de la droite « buissonnienne ». L’histoire de la Première Guerre mondiale n’échappe pas notre vigilance. Héritiers de Jaurès, nous y sommes même particulièrement attachés.

Pour en venir à la question spécifique des fusillés de la Première Guerre mondiale, nous tenons quelques points majeurs pour solidement acquis, grâce aux travaux récents des historiens.

1) la Justice militaire fut en 1914-1918 une justice d’exception qui n’avait que l’apparence de la justice, même aux regards des normes répressives des armées de l’époque. Seule une définition extensive presque sans limite des qualifications de « désertion en présence de l’ennemi », « abandon de poste » ou « refus d’obéissance », infractions passibles de la peine de mort selon le code de justice militaire, assura la légalité et l’apparence de la légitimité à la répression militaire. C’est une justice militaire expéditive qui conduisait ses victimes, parfois en 24 heures, au poteau d’exécution, sous la pression plus ou moins directe du commandement, sans instruction sérieuse ou avec une instruction strictement à charge, et sans que l’accusé bénéficie d’une véritable défense.

Cette justice militaire fut aussi particulièrement répressive puisque les comparaisons internationales montrent que l’armée française se singularisa de sinistre façon par le nombre des condamnations à mort et plus encore celui des exécutions pendant la Grande guerre.

2) C’est bien « pour l’exemple » que l’armée française fusilla 600 de ses hommes.

Les historiens ont aujourd’hui accumulé les témoignages de la volonté du haut commandement français de rendre une justice « pour l’exemple ». Le cérémonial macabre des exécutions, devant le front des troupes, et la publicité donnée aux condamnations et aux exécutions, au sein de l’armée et jusque dans les communes d’origine des fusillés en attestent aussi largement.

Il est établi que la désignation des accusés releva très souvent de l’arbitraire, notamment pour réprimer les mouvements collectifs de désobéissance par la désignation de « meneurs ». De même, ce sont souvent moins les faits reprochés que des antécédents ou l’origine sociale qui conduisaient devant un peloton d’exécution.

Par delà la nature et la commission établie ou non des faits reprochés aux accusés, tous les fusillés furent moins soumis à une procédure judiciaire que désignés comme instruments pour servir par l’exemple d’une répression impitoyable à la tenue en main des troupes.

3) Les 600 combattants français fusillés ne doivent pas faire oublier que le nombre des victimes de la répression militaire est beaucoup plus élevé. On ne connaîtra jamais le nombre des exécutions sommaires de soldats par un officier, des hommes délibérément exposés comme punition à une mort quasi-certaine en première ligne ou même abandonnés dans le no man’s land séparant les lignes de tranchées, des condamnés aux travaux forcés qui furent envoyés pourrir et mourir dans les bagnes coloniaux. Il ne faudrait pas oublier non plus les dizaines de civils fusillés pour espionnage ou de soldats allemands exécutés pour pillage, sans avoir eu le droit de présenter au minimum leur défense.

alexis-corbiere-com-public-019m-jpg 4) Les fusillés pour l’exemple de 1914-1918 ne sont pas les victimes d’une barbarie anonyme ou d’une tragédie impersonnelle de l’histoire. S’il y eut des fusillés, c’est qu’il y eut des fusilleurs. La responsabilité incombe au haut commandement, en premier lieu à Joseph Joffre pour les années 1914-1915 et à Philippe Pétain en 1917. Ce sont les chefs des armées qui autorisèrent et encouragèrent même les pratiques disciplinaires les plus répressives et les plus expéditives. C’est Joffre qui exigea des autorités civiles qu’elles abandonnent leurs prérogatives judiciaires sur la masse des citoyens mobilisés. C’est Joffre qui réclama – et obtint – le recours aux conseils de guerre spéciaux responsables de la moitié des exécutions pendant les dix premiers mois de la guerre.

Mais cette responsabilité est partagée avec celle du pouvoir exécutif, du Président de la république Raymond Poincaré, du gouvernement de René Viviani et des ministres de la guerre Adolphe Messimy et Alexandre Millerand en 1914, de Paul Painlevé en 1917. C’est le gouvernement qui céda au pouvoir militaire, qui abandonna jusqu’au droit de révision et au droit de grâce pour les condamnés à mort, qui tint volontairement le Parlement dans l’ignorance de l’ampleur de la répression et de la carte blanche donnée à l’état-major pour réprimer. Il y a là une leçon politique qui ne devrait pas être oubliée à l’occasion des prochaines commémorations.

Ces points établis, quelle place donner aux fusillés dans la mémoire nationale et les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale ?

1) Lionel Jospin a prononcé en novembre 1998, à Craonne, des paroles qui ont marqué un tournant dans les commémorations publiques. Elles peuvent encore aujourd’hui nous servir de point de repère. Oui, comme le disait Lionel Jospin, il faut que les fusillés « réintègrent aujourd’hui, pleinement, notre mémoire collective nationale. » Précisons que cette mesure de justice doit concerner à nos yeux l’ensemble des fusillés de la Grande guerre et pas seulement les mutins de 1917, et même plus largement toutes les victimes de la répression militaire.

2) Cette réhabilitation morale et civique ne pourra être que générale et collective. C’est la seule façon de rendre justice à l’ensemble des condamnés des conseils de guerre. C’est la seule façon de rendre justice aux victimes d’exécution sommaire, à ceux qui sont morts au bagne après que leur condamnation à mort a été commuée en peine de travaux forcés.

Nous savons aussi que les archives de la justice militaire ont perdues une partie – 20% ? – des dossiers et qu’une nombre considérable de dossiers sont aujourd’hui incomplets ou encore n’ont jamais contenu que des pièces à charge.

3) Faudrait-il pour autant interdire aux familles et aux associations qui défendent la mémoire des fusillés depuis bientôt un siècle, tout recours devant une cour de justice pour obtenir la révision des condamnations et la réhabilitation judiciaire des condamnés?

Nous pensons que la proposition de reconnaissance générale et collective n’exclut pas cette demande, portée notamment par la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) qui mène sur ce terrain une lutte exemplaire pour la justice et la démocratie depuis l’immédiat après-guerre. L’ouverture des archives de la Justice militaire et les travaux encore en cours des historiens permettent de découvrir des éléments nouveaux sur les faits eux-mêmes et sur le fonctionnement des conseils de guerre. Il y a sans doute matière à revoir des cas qui n’ont encore pas fait l’objet d’une révision par les tribunaux militaires et les cours spéciales de l’entre-deux-guerres.

Pour nous, les deux démarches ne se situent pas sur le même plan et peuvent être complémentaires. Il n’y a pas lieu de les opposer.

alexis-corbiere-com-public-monumentcaporaux01m-jpg 4) Reste que la mémoire des « fusillés pour l’exemple » ne doit pas occulter celle de l’ensemble des victimes de la guerre. L’armée française condamna à mort 2.400 de ses hommes et en fusilla 600. La guerre fit en France 1.300.000 morts et laissa 3 millions de blessés pour 8 millions de mobilisés au total. Réintégrer les fusillés de la grande Guerre dans la mémoire collective ne signifie pas privilégier ces morts sur telle ou telle autre catégorie de victimes. Le risque serait alors grand de construire une mémoire segmentée, voire une hiérarchie des victimes de la guerre, selon l’origine, la classe, l’affectation sur le front ou la façon la mort fut reçue.

Cette question de la place des fusillés dans la mémoire publique nous renvoie plus largement à celle du sens de la commémoration du 11-Novembre et du centenaire de la Première Guerre mondiale. Fusillés par l’armée française, tirailleurs africains expédiés de force dans les tranchées de Verdun ou lancés à l’assaut du Chemin des Dames, paysans, ouvriers et instituteurs écrasés sous les bombes de l’artillerie allemande et parfois de l’artillerie française, soldats gazés dans des abris de fortune ou la boue, grands blessés morts en 1919 ou 1920 après d’atroces souffrances, il n’y a pas lieu de célébrer aujourd’hui des morts plus nobles ou plus dignes de pitié, des victimes plus innocentes ou plus consentantes.

La mort des fusillés pour l’exemple, comme celle des autres combattants s’inscrit dans une même logique, celle d’une guerre de masse, moderne, industrielle et bureaucratique qui broya des dizaines de millions d’hommes et en tua 11 millions. Tous, les fusillés comme les autres, moururent non pas d’une tragédie sans cause ou d’un absurde enchaînement de circonstances sans responsables. De la même manière que l’on peut remonter de l’exécution des soldats aux responsabilités militaires et politiques qui permirent d’obtenir l’obéissance absolue des soldats sous peine de mort, il est possible et nécessaire de toujours mieux préciser les raisons et les responsabilités politiques, économiques et idéologiques de la guerre.

Pour nous, ce sont ces préoccupations d’éducation collective et de formation civique qui doivent présider aux commémorations à venir. C’est en tout cas dans cet état d’esprit que le PG compte y prendre toute sa part.

Quelles formes pour la commémoration ?

1) Nous pensons qu’il est temps de rompre avec une conception traditionnelle et pour tout dire conservatrice des cérémonies commémoratives. Est-il bien conforme aux valeurs de la République de s’en tenir à la mise en scène d’un peuple passif, devant les armées ou son écran de télévision pendant qu’un monarque, fut-il élu au suffrage direct, déclare une vérité officielle ?

Le PG soutient qu’il est possible de transformer la commémoration en un moment de réflexion politique, c’est à dire collective, en mettant à contribution intellectuels, savants et artistes comme les responsables politiques et les représentants du monde associatif et du mouvement social. Créations littéraires, théâtrales, musicales, expositions et lectures publiques, pourquoi ne pas associer toutes les formes de la créativité populaire au service de la célébration de la mémoire collective ?

De fait, la question des fusillés de la grande Guerre s’y prêterait particulièrement bien. D’une part, parce que le pouvoir politique et notamment le pouvoir exécutif n’est pas le mieux placé pour tenir le premier rang dans la commémoration des fusillés pour l’exemple à cause du rôle qu’il a joué aux moments où la répression aux armées fut la plus féroce. Ensuite, parce que c’est bien de la société que viennent les forces qui se mobilisent depuis plus de 90 ans pour obtenir la réhabilitation des condamnés.

2) Pour dire clairement les choses, le PG ne pourrait se satisfaire d’une présidentialisation de la mémoire collective, déjà trop exacerbée par Nicolas Sarkozy et ses conseillers « historiques » Patrick Buisson et Henri Guaino. Et s’il faut à tout prix, à l’inauguration du cycle commémoratif du centenaire de l914-1918, mettre à l’honneur une institution politique c’est au Parlement de tenir le premier rang. Que le souvenir des fusillés pour l’exemple comme celui de la Grande Guerre toute entière serve à rappeler que les parlementaires jouèrent un rôle décisif pour réduire la rigueur de la justice militaire dans le cas précis des fusillés. Et plus largement, que ces commémorations rappellent que c’est un régime parlementaire qui sut en 1914-1918 organiser et conduire la défense nationale, allant jusqu’à débattre en séance des choix stratégiques du commandement.

Après un quinquennat pendant lequel la pratique de l’histoire « bling bling » a pu encore, comme une évidence, accroître le champ d’intervention du présidentialisme exacerbé de la Ve République, saisissons l’occasion d’en finir, une fois pour toute, avec les usages et mésusages politiques de l’histoire.

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