Des avocat-e-s, magistrat-e-s, et professionnel-le-s de la Justice et du droit en marche pour la 6ème République!
La 5ème République est à bout de souffle. L’hyper-concentration des pouvoirs au profit de l’exécutif, sur fond de capitalisme financier mondialisé, a fait exploser la corruption. Chaque jour apporte son lot de révélations, non seulement sur cette corruption, dénoncée depuis des années par des juristes et des observateurs de renom (avec dès 1996, « L’appel de Genève »), mais aussi sur « l’entre-soi » de celles et ceux qui s’y livrent. L’affaire Cahuzac, symptôme de la collusion existante et grandissante entre les hautes sphères financières et la direction de l’Etat, dépasse de loin la dérive d’un homme seul. Grâce à la presse d’investigation indépendante des puissances d’argent, les citoyen-ne-s découvrent, médusé-e-s, un vaste système d’impunité d’une oligarchie se considérant non seulement comme au-dessus des lois, mais également exonérée du respect du civisme le plus élémentaire.
Il est temps que prenne fin le scandale de l’évasion fiscale dans les paradis fiscaux, qui représentent pour la France le montant de l’impôt sur le revenu, soit environ 45 milliards d’euros, alors que le gouvernement prône des économies budgétaires qui n’affectent que les plus démunis.
Depuis des années, la justice chargée de la lutte contre la corruption a été méthodiquement étranglée. Les juges d’instruction sont de moins en moins saisis car le parquet, dépendant de l’exécutif, préfère contrôler seul les dossiers économiques et financiers, qu’il s’agisse de l’affaire Bettencourt ou de l’affaire Cahuzac. Les juges et les policiers sont privés de moyens et leurs d’investigations sont entravées. Le droit est un fétu de paille face à la finance folle.
Résultat : en 2012, la France n’était classée qu’au 22ème rang (sur 174) des pays les moins corrompus du monde, selon l’ONG « Transparency international », derrière Singapour et Hong-Kong, par exemple.
Il est illusoire de penser que c’est seulement avec des mesurettes que nous pourrons rompre avec cette prédation financière d’un petit nombre, d’autant plus insupportable en temps de crise sociale majeure. Dans ce contexte, pour sauver la République et les valeurs qui la fondent, une rupture s’impose.
C’est pourquoi nous, juristes et professionnel-le-s de la justice, appelons à participer à la grande marche citoyenne organisée à Paris le 5 mai 2013 pour exiger l’élection d’une assemblée constituante afin de promouvoir une 6ème République, élaborée de manière démocratique. Ce n’est qu’à cette condition qu’un nouvel équilibre des pouvoirs pourra être édifié : une assemblée souveraine, un gouvernement responsable et une justice indépendante.
Premiers signataires:
Gérard BOULANGER, ancien président du Syndicat des Avocats de France et président d’honneur d’Avocats européens et démocrates
Alima BOUMEDIENNE-THERY, juriste
Isabelle BOUCOBZA, juriste
Dominique BRAULT, ancien secrétaire général du Syndicat de la magistrature
Anne BRUSLON, magistrate syndiquée
Sandrine CHABANEIX, magistrate syndiquée
Christian DANIEL, directeur de service, syndicaliste
Daniel FALLOT, magistrat syndicaliste
Hélène FRANCO, magistrate syndicaliste
Raquel GARRIDO, avocate au barreau de Paris
Charlotte GIRARD, maître de conférences en droit public
Nicolas GUILLET, maître de conférences en droit public
Roselyne GONLE-LHULLIER, magistrate syndiquée
Xavier LAMEYRE, magistrat du siège et criminologue
Anne LECLERC, éducatrice PJJ, syndicaliste
Marie-José MARAND-MICHON, magistrate syndiquée
Patrice MEILLIER, défenseur aux prud’hommes et juriste
Marianne MUGNIER, éducatrice PJJ syndiquée
Christian NANINI, magistrat du parquet, syndiqué
Dominique NOGUERES, avocate au barreau de Paris
Evelyne SIRE-MARIN, ancienne présidente du Syndicat de la magistrature
Mylène STAMBOULI, avocate au barreau de Paris
Daniel DELREZ, Avocat honoraire au barreau de Metz
Françoise LAROCHE, éducatrice PJJ, syndicaliste
Celine CURT, avocate au barreau de Seine-Saint-Denis
Jean Jacques CIAVAGLINI, ancien éducateur PJJ et ancien délégué du Procureur à Aix en Provence
Euro • L’euro Merkel n’est pas une fatalité
A en croire les différents commentateurs des médias dominants et les économistes officiels de la pensée libérale, il n’y aurait pas d’alternative. Nous serions condamnés à subir l’euro tel qu’il est car le seul autre choix qui s’offrirait à nous serait la sortie de l’euro prônée par le Front National. Il n’y aurait pas d’autre avenir pour la monnaie que le repli identitaire ou la résignation devant le diktat des technocrates européens et de la bourgeoisie allemande. L’euro est pourtant une construction politique et historique. Il ne tient donc qu’à nous de le mettre sur une autre voie, c’est-à-dire d’en faire une monnaie au service des peuples.
Une monnaie au service de la bourgeoisie allemande
Républicains et internationalistes, nous ne défendons pas une sortie unilatérale de la zone euro. Notre but n’est pas d’en revenir à une monnaie nationale sans esprit coopératif européen et de laisser le reste de l’Europe dans le chaos ultra-libéral. Notre objectif est donc de transformer la monnaie unique. La simple négociation n’y suffira pas. L’Allemagne ne se résoudra pas facilement à dévaluer l’euro et à le soumettre à contrôle politique, car toute la construction de l’euro s’est faite au service de sa classe dominante. En 1992 avec le traité de Maastricht, l’Allemagne a réussi à imposer une monnaie unique à l’image du Deutsche Mark : surévaluée, servant une politique exclusivement anti-inflationniste, limitant arbitrairement les déficits publics et prônant la libération des mouvements de capitaux sans harmonisation fiscale. Le patronat allemand a intérêt à avoir une monnaie forte, car il importe énormément de produits de base et de composants à bas coûts qu’il transforme pour les revendre à l’intérieur de la zone euro. Par ailleurs, le peuple allemand épargne beaucoup et est vieillissant : l’objectif anti-inflationniste garantit les intérêts de la rente et de l’épargne. Le modèle de modération salariale leur a permis de jouer les « passagers clandestins » de la zone euro en empêchant les autres pays d’adapter leur compétitivité et l’Allemagne se refuse à payer le prix d’un réel partenariat économique.
L’euro Merkel est une calamité pour l’industrie française et celle des autres pays du sud de l’Europe. Sa surévaluation pénalise fortement nos exportations. Ne pouvant plus utiliser l’arme monétaire pour diminuer leurs coûts par la dévaluation, tous les pays de la zone euro mène une politique de rigueur salariale pour augmenter leur compétitivité. Les exonérations des prélèvements fiscaux et sociaux pesant sur les entreprises et les revenus du capital se multiplient. La protection sociale et le pouvoir d’achat s’effondrent conjointement. Par ailleurs, cette politique monétaire encourage la formation de bulles financières et immobilières à l’origine de la crise et nous empêche de lutter efficacement contre elles. L’euro tel qu’il est nous condamne à l’austérité généralisée et dresse les travailleurs les uns contre les autres.
Refonder la zone euro
La zone euro a donc besoin d’être intégralement refondée, en donnant à chaque Etat la possibilité de compenser un choc conjoncturel par une hausse du déficit public et en augmentant la solidarité budgétaire entre les Etats. Un nouveau statut de la Banque centrale européenne doit être créé, l’obligeant à œuvrer au soutien de l’activité et de l’emploi en prêtant directement aux Etats avec une inflation soutenable, et en étant responsable devant le Conseil européen et le Parlement européen. L’ensemble de la politique de l’Union européenne doit également être réorientée. Un processus de convergence des pays les moins avancés vers des standards plus élevés en matière de droits sociaux et de protection sociale doit être mis en place.
Pour que cette refondation ait lieu, nous devrons mener la confrontation au sein des institutions bruxelloises en désobéissant aux traités européens. Pour pousser l’Allemagne à accepter une refonte des statuts de la BCE, nous pourrions être amenés à faire en France ce qu’elle se refuse à faire au niveau européen. Un gouvernement déterminé aura toutes les chances d’être soutenu par les pays d’Europe du Sud et de faire ainsi plier l’Allemagne, qui a beaucoup à perdre dans la disparition de l’euro.
Les leçons de Chypre
La crise chypriote est en ce sens riche d’enseignement. Le vote unanime de son Parlement a permis de refuser le premier plan qui visait à ponctionner les dépôts de l’ensemble des épargnants. La résistance nationale face à la technocratie européenne peut donc aboutir à de meilleures solutions pour les peuples. Par ailleurs, la mise en place de contrôles sur les mouvements de capitaux et les taux de change, contraires aux traités européens, a été activée. Ils ont empêché la panique bancaire à Chypre et prouvent que les traités ne sont pas gravés dans le marbre quand il y a la volonté politique. Si un pays de la taille de Chypre, avec une économie qui représente 0,2% du PIB de l’UE, a pu à ce point ébranler les institutions européennes et les pousser à de tels contournements des traités, alors cela donne de l’espoir sur la capacité de la France à renverser la table et à réformer intégralement la BCE. La confrontation passera d’abord par la réforme des statuts de la Banque de France pour lui permettre de monétiser la dette, c’est-à-dire d’acheter des obligations d’États en son nom et sur le marché primaire. Elle sera accompagnée d’un contrôle strict des mouvements de capitaux. Cette création monétaire unilatérale entraînera notamment une dévaluation de l’euro. Il est clair que cette désobéissance pourrait conduire certains à vouloir notre exclusion de la zone euro, même si ça n’est pas prévu par les traités européens.
Construire d’autres solidarités
Nous abordons avec sérénité cette possibilité. Si la BCE refuse de se réformer avec la prétention de nous obliger à mener une politique néo-libérale pour rester dans la zone euro, nous construirons d’autres solidarités, fondées sur un nouveau rapport de forces. Nous pourrions, par exemple, négocier la création d’un « eurosud » dévalué et refondé sur des principes coopératifs ou, si cela s’avère impossible, créer une monnaie commune pour les échanges extra européens et revenir à des monnaies nationales au sein d’un système monétaire européen. La BCE aurait alors pour objectif de stabiliser les taux de changes intra-européens pour limiter les différences d’inflation entre pays. Le Parti de Gauche ne sacralise aucun système monétaire en lui-même et sait que la monnaie est à la fois un outil politique et une réalité sociale. Il ne fait prévaloir que l’absolue nécessité de mener les politiques publiques progressistes exigées par la souveraineté populaire. Si l’alternative qui venait à se présenter était le maintien de la zone euro dans la soumission au carcan néolibéral, ou bien la sortie de l’euro pour appliquer le programme validé par le vote des citoyens, le Parti de Gauche opterait sans hésitation pour cette seconde solution.
Elections Venezuela • Veille de scrutin à Caracas
Eric Coquerel et Christophe Ventura, deux membres de la direction nationale du Parti de Gauche, sont présents, du 11 au 16 avril, au Venezuela pour l’élection présidentielle de ce dimanche 14 avril. Eric revient dans son blog sur l’ambiance qui règne dans la capitale Caracas à quelques heures du scrutin.
A moins de 24 heures de l’élection présidentielle de la République Bolivarienne du Venezuela, je peux confirmer qu’ici règne bien une dictature. Songez que depuis le vendredi 12 avril, 17 h locale, la loi électorale interdit toute goutte d’alcool dans le pays… Et ce jusqu’à lundi matin. Voilà bien, « cher » Daniel Cohn-Bendit (voir sur ce blog la video du débat au Grand Journal qui m’a opposé à lui sur ce thème) et consorts, vous qui propagez à satiété que Chavez était un dictateur sans jamais avoir pris la peine de mettre un pied dans ce pays, ou dans les rues de ce pays pour les journalistes français habitués aux séjours cloîtrés dans leurs hôtels de luxe, la preuve irréfutable que vous cherchiez non ? Tout en maugréant un peu, je l’admets, contre cette règle qui nous prive du très réputé Rhum vénézuélien ou simplement d’une Cerveza locale, voilà la plaisanterie qu’avec mes amis Bernard Cassen et Christophe Ventura, également présents à Caracas, nous nous sommes faits hier soir.
Ambiance populaire et festive
Pour le reste, l’ambiance à Caracas est à milles lieux de la propagande distillée par les médias ou chroniqueurs bien pensants qui aiment à répéter en boucle des affirmations que même la droite ici n’ose énoncer avec autant d’arrogance et de mauvaise foi. Je me faisais cette réflexion en sillonnant les rues de la capitale vénézuélienne sitôt descendu de l’avion jeudi soir. Jeudi c’était à la fois le 11ème anniversaire du putsch raté contre Chavez en 2002 et la date du grand meeting de Nicolas Maduro. Une marée humaine de partisans de Maduro, t-shirt et casquettes rouges, a envahi les principales artères de Caracas. Mélange joyeux et festif d’une foule déambulant à pieds, en bus collectif, en moto ou en voiture vers le lieu du meeting. Le lieu ? Il est compliqué à indiquer avec précision car les sept plus grands boulevards de la capitale étaient rouges de supporters Chavistes. Ici, c’est l’unité de mesure pour jauger d’une manifestation : combien d’artères remplis-tu et je te dirais combien tu étais. Sept c’est manifestement la jauge maximum qui permet, sans risquer d’être contredit, d’utiliser le million pour unité. Après est-ce 3 millions comme je l’ai entendu dire ? Impossible pour moi de le confirmer mais c’est évidemment, et de loin, le plus grand des meetings politiques qu’il m’ait été donné de voir. Le discours de Maduro a duré 1h30 – je reviendrai sur son contenu plus loin. Le président par intérim a tenu à mettre en avant ses ministres, les responsables des partis qui le soutiennent et quelques invités de prestige comme Maradona venu lui donner l’accolade. Mais revenons à la foule. Première chose qui saute aux yeux : elle est très féminine. Beaucoup de femmes de tous âges non seulement présentes physiquement mais surtout politiquement : elles tiennent les micros sur les nombreux camions sonos ou dirigent de la voix et des slogans les groupes qui se forment sur les trottoirs. L’ambiance est « bon enfant ». Le tout donne un mixte entre supporters de foot, soirée à la fête de l’Huma, et la grande marche du Front de Gauche à la Bastille le 18 mars 2012. Une chose me surprend rapidement : si les affiches de Maduro dominent largement le centre de Caracas où se déroule ce gigantesque rassemblement, celles, laissées intactes du candidat de la droite, Henrique Capriles, ne sont pas rares. Les deux partagent même parfois un poteau sans que nul ne songe manifestement à en arracher une. « C’est la tradition politique ici » me confirmera Bernard Cassen. Autre surprise : à quelques centaines de mètres du rassemblement pro-Maduro, des supporters tout de jaunes vêtus, la couleur du mouvement Unidad, soutiennent bruyamment Henrique Capriles Radonski sans manifestement une once d’inquiétude. D’ailleurs sur les terrasses il n’est pas rare que casquettes rouges et jaunes se côtoient à quelques tablées l’une de l’autre en ce jeudi soir. On aura compris que l’ambiance n’est ni à la guerre civile, ni à la peur.
La droite joue la stratégie de la tension
Pourtant les leaders de l’opposition jouent la tension. C’était palpable vendredi, lors de leur audition devant les accompagnateurs internationaux réunis par le Conseil National Electoral (CNE). Ils ont concentrés leurs interventions sur la crédibilité du scrutin. Attaqué principalement le CNE, une des cinq branches du pouvoir public national dont l’autonomie est reconnue par la constitution à côté des autres pouvoirs, exécutif, législatif, judiciaire et citoyen. Le ton très offensif des représentants de Capriles avait manifestement pour but de donner corps à des éléments qui en manquaient justement. Rien en tous cas de nouveau pouvant expliquer pourquoi Capriles, qui avait reconnu la sanction des urnes en octobre dernier, parait cette fois la mettre en doute à l’avance. Plusieurs des accompagnateurs internationaux, dont beaucoup de Nord-américains, ont interrogé ses représentants sur ce paradoxe sans aucune réponse probante. D’autres, Sud-américains, ont avancé la fiabilité du système de vote électronique mis au point par le CNE « supérieur à ce qui fait ailleurs sur le continent » (dixit un écrivain brésilien), car prévoyant une confirmation papier (le vote électronique émet un récépissé mis à son tour dans une urne, les deux devant, au final, correspondre en nombre de votants). Est-ce que cela augurerait d’une contestation du scrutin ont demandé les accompagnateurs ? Les représentants de la droite sont restés vagues se contentant de rappeler que Capriles avait toujours accepté, jusqu’à maintenant, la volonté populaire. Dans les rangs Chavistes les interrogations demeurent sur leurs objectifs même si les sondages qui circulent officieusement donnent une telle avance à Maduro (on parle de 10 points) que l’on doute des possibilités de contester sérieusement le résultat dimanche.
Il est vrai que le ton de Capriles est d’autant plus vif sur ce point que son contenu programmatique s’est adouci voir a disparu… En réalité, Henrique Capriles ne peut se démarquer des acquis du Chavisme qu’il a pourtant combattu. Le leader de la droite fait plutôt dans la surenchère sociale ces derniers jours allant jusqu’à promettre une augmentation de 40 % du salaire minimum contre 20 % pour Maduro !
Les nouvelles « missions » de Maduro
Nicolas Maduro n’a nul besoin de ces promesses à l’emporte-pièce. Ce syndicaliste, proche de l’ancien président, reprend évidemment les cinq grands objectifs historiques énoncés lors de la campagne de Chavez en octobre dernier (en résumant succintement : Indépendance nationale, poursuite de la construction du socialisme bolivarien du 21ème siècle, coopération accrue avec les pays d’Amérique latine et des Caraïbes, contribution à la construction d’un monde multipolaire garantissant la paix dans le monde, préservation de la vie et de l’espèce humaine sur la planète). De même il poursuit les « missions » (objectifs précis que le gouvernement se donne à réaliser à court terme) lancées par Chavez notamment dans le domaine du logement, de la santé, de l’éducation… Mais il a ajouté jeudi, pour la première fois m’explique Maximilien Arvelaiz, ambassadeur du Vénézuéla au Brésil et étudiant en France au début des années 2000, les siennes propres. Parmi elles : l’investissement, c’est à dire la nécessité pour le Venezuela, pays dont l’économie est dépendant de sa rente pétrolière, de diversifier rapidement sa production industrielle et agricole pour gagner en souveraineté, notamment alimentaire, afin de limiter de coûteuses importations ; la lutte contre la corruption ; la sécurité. Sur ce dernier point, Chavez avait déjà entamé le travail en créant une police nationale. Car jusqu’en 2011, le Venezuela ne disposait que de polices municipales donc non coordonnées. Le corps de la police nationale est aujourd’hui de 16 000 membres.
Construire l’Etat social
J’avoue que lorsque que Christophe Ventura m’a annoncé cela j’ai été surpris. En réalité sur bien des aspects, Chavez a du construire depuis 1998 les fondations d’un Etat social et parfois même les outils d’un Etat tout court telle cette police nationale. Nationalisation, redistribution des richesses produites par la rente pétrolière, politique de la santé, du logement et de l’éducation, indépendance nationale : on retrouve là des objectifs qui s’apparentent à ceux d’une reconstruction sur des bases sociales de type de celle entreprise par le CNR à la libération en France. Je lui résume en souriant ma pensée : « Chavez en définitive c’est le CNR et la théorie du Foco »… A quoi, sans doute plus pertinent, Christophe répond « Chavez c’est plutôt un mélange de De Gaulle et Che Guevara »
On le voit, si la révolution Bolivarienne a le socialisme pour ligne d’horizon, on peut même dire l’écosocialisme, terme dont beaucoup des dirigeants du PSUV se réclament aujourd’hui, les objectifs à moyen terme sont ceux d’un Etat social (l’impôt sur le revenu reste par exemple à inventer au Venezuela). Mais cette mise en mouvement au cours des années 2000, pareillement démarrée par l’ »autre gauche » dans plusieurs pays sud-américains dont l’Equateur, mine évidemment tout l’édifice libéral qui n’a eu de cesse justement de déconstruire partout l’Etat social. Sa subversion de l’ordre libéral et austéritaire donne une incontestable portée révolutionnaire au Chavisme. Non seulement reconnue par les siens : ce peuple vénézuélien qui devrait, dimanche, élire largement Nicolas Maduro, mais plus largement par l’ensemble de la gauche sud-américaine. C’était manifeste lors d’un dîner organisé vendredi par le PSUV : représentants le PG (seul parti de la gauche française et du Front de Gauche à être représenté ces jours-ci à Caracas), Christophe Ventura et moi-même avons pu entendre de la bouche de tout ce que le continent compte de partis de gauche (hors social-démocratie totalement hors jeu voir opposée aux processus en cours) des hommages sincères et sans langue de bois à Chavez et l’importance de la révolution bolivarienne pour consolider ou développer le processus de transformation sociale et écologique entrepris à des degrés et rythmes divers sur le continent sud-américain.
En les écoutant, j’ai pu vérifier combien était aigue chez eux la conscience que les expériences de révolution citoyenne en cours en Amérique latine, à commencer par celle du Venezuela, constituait la première alternative concrète et réussie pour sortir de la longue nuit néolibérale. Celle qui a commencé par assombrir le monde voici plus de 30 ans aux Etats-Unis et en Angleterre sans oublier le Chili de Pinochet, terre d’expérimentation des Chicago boys inspirés par l’économiste libéral Milton Friedman. Dans une courte intervention (à l’inverse de bien de mes amis du PG je ne maîtrise malheureusement pas la langue de Garcia Marquez), je le résumais ainsi « Lo que es Chavez no muere. Tenemos que actuar para sur lo que fue Tatcher muera con ella, por siempre ». L’élection de Nicolas Maduro dimanche devrait être un coup supplémentaire porté au néolibéralisme. En attendant que la chaine craque à son tour en Europe.
Je ne voudrais pas terminer cette note sans une anecdote. La révolution bolivarienne c’est aussi, c’est sans doute surtout, la réconciliation de l’espérance socialiste avec la démocratie. C’est évidemment essentiel pour nous qui pouvons ainsi nous appuyer sur des expériences concrètes en la matière à opposer à l’idéologie libérale. La pays où l’on va voter pour la 16ème fois en 15 ans (et l’été prochain ce sont déjà les municipales), le pays où existe le référendum révocatoire à mi-mandat que nous proposons aujourd’hui dans le cadre de la 6ème république, est une source d’inspiration dans le domaine de l’implication citoyenne. J’y réfléchissais vendredi quand déambulant dans la principale artère commerçante de Caracas je découvrais la vice-présidente du PSUV, Ana Elisa Osorio, tenir un forum citoyen en plein air réunissant sous un simple auvent de tente des dizaines de personnes. Je pensais alors à la fierté de Temir Porras, vice-premier ministre des affaires étrangères, en annonçant aux accompagnateurs internationaux, vendredi : « nous devrions avoir environ 80 % de participation dimanche». Et à ses côtés, Maximilien Arvelaiz (moins de 80 ans à eux deux) d’ajouter : « ce sera une grande fête démocratique ». Je n’ai pu alors m’empêcher de comparer ces records de participation au phénomène inverse dont la France pâtit. Sans doute qu’un affrontement électoral à enjeu entre la droite et une gauche digne de ce nom, donne tout simplement envie de voter. Fasse que le Front de Gauche puisse prouver tout cela rapidement en France.
>>> Lire la suite sur le blog d’Eric Coquerel.
Sébastien Migliore, syndicaliste et élu, paie très cher ses actes de résistance !
Sébastien Migliore, conseiller municipal PCF Front de Gauche en charge de l’économie, de l’emploi et de l’insertion à Cendras (Gard), délégué communautaire à la communauté des communes du Pays Grand Combien n’en revient pas lui-même.
Pendant les manifestations lors du mouvement social des retraites en 2010, Sébastien s’est vu convoqué pours divers dossiers à charge, tels que violences sur les forces de l’ordre, jet de projectiles (œuf), destruction de bien public, refus de prélèvement ADN……
Après 10 passages devant les tribunaux, Sébastien, relaxé pour coups et blessures sur les forces de l’ordre (le parquet ne faisant pas appel), vient de se voir condamner en appel le 12 avril 2013 ::
– 500 euros d’amende avec sursis pour destruction de bien public, pour avoir mis le feu à une poubelle,
– 200 euros d’amende pour refus de prélèvement ADN,
– 2 mois de prison avec sursis (après avoir été relaxé en première instance) pour jet de projectiles sur les forces de l’ordre
– 5 ans d’inéligibilité
– 1000 € d’amende ajouté aux 100 euros de dédommagements dont les heureux bénéficiaires seront les 6 représentants des forces de l’ordre « blessés » par un jet d’œuf .
Deux poids deux mesures : combien d’élus condamnés pour des faits divers comme « abus de biens sociaux », et qui ont au plus été frappé d’an ou au maximum deux ans d’inéligibilité. Ainsi Patrick Balkany inéligible pour 2 ans seulement alors qu’il faisait rémunérer 3 employés municipaux qu’il occupait pour son propre logement.
Ainsi, il serait moins grave de confondre l’argent public avec son propre argent que de lancer un œuf sur un policier selon que vous soyez puissant ou misérables…. Sébastien Migliore paie une bien lourde peine.
Le Parti de gauche rappelle que la loi d’Amnistie des militants votée au Sénat passera devant à l’assemblée nationale le 16 mai prochain et continuera à se mobiliser afin que les député-es prennent leurs responsabilité et vote cette loi de justice sociale qui doit reprendre l’ensemble des dispositions de départ au moment de son dépôt par les élu-e-s du Front de Gauche.
Car aujourd’hui plus que jamais, la Loi d’amnistie pour tous les militants sociaux prend un caractère d’urgence sociale !
Paris Match • Jean-Luc Mélenchon à la conquête des océans
Depuis plus d’un an, Jean-Luc Mélenchon a le regard tourné vers le large. Energies marines, avenir de la pêche, mariculture, exploitation des ressources minières, tous ces thèmes prennent une part de plus en plus importante dans ses propos. La France a le deuxième territoire maritime au monde et c’est en mer que se trouve son avenir, martèle-t-il à longueur de discours. Le patron du Parti de gauche multiplie les rencontres avec les professionnels du secteur, pêcheurs, ingénieurs ou scientifiques.
Pour sa conquête des océans, le député européen est conseillé par Nicolas Mayer, un Aquitain qui dirige le syndicat national des personnels de l’administration de la mer, rattaché à la CGT. L’homme est un fin connaisseur des dossiers maritimes, qui s’évertue à conjuguer les exigences de l’«écosocialisme», nouvelle doctrine de Mélenchon, aux perspectives offertes par l’expansion en mer. Jean-Luc Mélenchon, lui, est convaincu que le sujet est porteur d’une espérance qui a déserté la politique française. Pour Paris Match, le tribun a développé sa vision.
Paris Match. Pourquoi l’économie de la mer prend-t-elle désormais tant de place dans vos discours politiques?
Jean-Luc Mélenchon. Au départ, j’étais à la recherche d’un horizon. De quelque chose qui soit susceptible d’enthousiasmer, de donner du sens à l’action économique et à l’action sociale. Un responsable politique, ça ne peut pas être simplement quelqu’un qui dit: «Moi, je vais vous expliquer comment réduire les dettes de telle sous-administration». Les français marchent à l’enthousiasme et aux défis! Je me suis aperçu en travaillant, en mettant les choses bout à bout, que je venais de mettre la main sur une politique globale qui donnait un point d’appui à un «keynésianisme» moderne.
Et pourtant, alors que vous en parlez très régulièrement aujourd’hui, ça ne figurait pas dans votre programme présidentiel.
Dans la campagne présidentielle, j’ai aussi découvert tout un monde. C’est le contact avec les professionnels de la mer qui m’a mis en jambes, en quelque sorte. Ça m’a confronté à un milieu que je ne connaissais que de loin. Et à mesure que la campagne se déroulait, les défauts que contenait le programme -on peut trouver qu’il est davantage compilatoire que visionnaire à certains moments- m’ont paru insupportables. Je me suis dit: non, je ne peux pas continuer comme ça. Et puis, l’idée de l’expansion humaine en mer s’est présentée à moi comme une espèce d’antidote à la déprime générale. Et comme un fait d’évidence totalement occulté!
Vous dressez souvent un parallèle avec la conquête spatiale. D’où vous vient cette fascination pour le progrès scientifique?
L’utopie d’un humanisme radical. On peut tout avec nos cerveaux à condition qu’ils ne soient pas encombrés de préjugés. Chaque fois qu’on fait la démonstration que c’est vrai, je hurle de joie. Et puis c’est très profond en moi et très ancré. Quand j’étais gamin, je découpais et je collectionnais les articles sur la conquête de l’espace. Je crois que j’ai encore dans ma cave un cahier où j’avais collé fiévreusement les exploits de la chienne Laïka et de Youri Gagarine.
« LE TRAVAIL QU’AVAIT FAIT ROCARD POUR
L’ANTARCTIQUE, C’ÉTAIT TOUT À FAIT ADMIRABLE »
L’économie de la mer, c’est aussi du pétrole, du gaz, des terres rares dans les profondeurs des océans. Vous vous dites partisan de l’écosocialisme: quelle place y tiennent ces ressources?
Nous avons pour l’essentiel une page neuve, même si l’expansion humaine en mer a commencé sur le mode néo-libéral. Il est temps de dire que certaines choses ne seront pas faites en mer. Il y a eu des moments de sagesse humaine, par exemple quand on a décidé que l’Antarctique serait un endroit préservé où l’on n’aurait pas le droit d’avoir certaines activités. On se rappelle du travail qu’avait fait Rocard pour ça, c’était tout à fait admirable.
Donc il ne s’agit pas d’exploiter par tous les moyens les fonds marins.
Voir la suite de l’article sur Paris match
Ce que sera la 6e République
C’est le moment où beaucoup réalisent. C’est pour eux un choc de consternation, de stupéfaction, d’effarement ou tout simplement un choc de trouille… La 6e République, on va la faire ! Pour de bon. Une fois de plus, les importants qui nous regardent de haut sont victimes de leurs œillères. Lorsque nous avons fait du changement de République le thème de nos trois grands rassemblements de la campagne présidentielle, ils ont « décrypté » ce qu’ils prenaient pour un « coup de com’ » et l’ont rangé au rayon des bonnes trouvailles à côté de la cravate rouge du candidat. Ils ont confié nos discours à des linguistes spécialistes du populisme et en ont tiré de beaux nuages de mots. Mais ils n’ont rien entendu de ce que nous disions. Ils n’ont pas compris ce que déclarait Jean-Luc devant la foule du Capitole à Toulouse. « Voyez, vous tous qui vous demandez ce qu’est ce phénomène : ce phénomène qui remplit cette place, les rues avoisinantes et les places avoisinantes, cela s’appelle la révolution citoyenne, qui est commencée ! Nous avons, nous, appelé à cette mobilisation comme nous l’avions fait avant à la Bastille, et comme nous le ferons encore à Marseille dans quelques jours. C’est une même marche, et nous vérifions, ici, là, qu’à notre appel vous répondez. Car nous savons que demain vous aurez déjà fait cette répétition générale, et que si c’est moi qui suis élu, lorsque je vous appellerai, vous y serez ! Et qui que ce soit qui soit élu en définitive, rien ne fera rentrer dans son lit le fleuve qui est en train de déborder ! (…) Nous voulons que soit élue une Assemblée constituante, dont le premier rôle sera de redéfinir la règle de vie commune. »
Notre force, c’est que nous ne lisons pas les textes écrits par d’autres. Dans les années 30, Orwell disait des intellectuels qui accompagnèrent majoritairement l’essor des totalitarismes qu’ils avaient « l’esprit réduit à un gramophone ». Cette formule s’applique à merveille aux crânes d’œufs qui recrachent les exigences des financiers, récitant les traités européens et autres éléments de langage vendus par Stéphane Fouks et ses communicants. Orwell s’étonnait de leur indécence, rendue possible par leur totale insensibilité à la part de bonheur et d’humanité que recèle la vie des petites gens, aussi dure soit-elle, et par leur ignorance presque complète des vies concrètes que leurs raisonnements abstraits venaient à briser. Les gramophones de notre époque ajoutent à l’intransigeance à laquelle peut conduire l’abstraction de leur pensée le cynisme caractéristique de l’idéologie libérale. Pour eux les discours ne sont jamais vrais. Ils ne font qu’habiller les égoïsmes individuels qui sont pour eux le seul fondement de la vie en société. C’est pourquoi, non content de s’écouter parler, ils n’entendent pas ce que nous disons.
Mais nous, nous prenons au sérieux ce que nous disons. Nous pesons souvent nos mots. Nous les pensons toujours. Plus important encore, le grand nombre de ceux qui sont là les entendent et les comprennent. Des milliers de consciences libres ont donc adhéré à cette idée que la présidentielle était une répétition générale de la révolution citoyenne pour une Sixième République. Ces gens n’ont pas disparu le 6 mai 2012. A la différence du système médiatique, ils n’ont pas une mémoire de poisson rouge. Ils comprendront donc qu’en appelant au 5 mai nous tenons la promesse que nous leur avons faite à la présidentielle. Et qu’après un an moins un jour ils peuvent récupérer leurs chaussures de marche quand bien même ils les auraient laissées sur le bord de la route.
Les puissants voudraient tellement que cette campagne n’ait été qu’une parenthèse ! Pour eux les élections sont une procédure de recrutement un peu particulière. Une fois le poste pourvu, on peut jeter les CV à la poubelle. Le débat est clos puisque le résultat donne raison à l’élu et tort au battu. Ce dernier doit attendre la prochaine fois (il peut s’opposer pour la forme) ou se rallier. Mais avions-nous tort de vouloir la 6e parce que nous n’avons pas été élus ? Rappelons le contexte. Cahuzac n’était même pas ministre. Pourtant le candidat Hollande lui-même admettait que le système ne fonctionnait pas correctement. Ségolène Royal appelait déjà à un coup de balai. Comment Hollande le traduisit-il ? Il proposa de balayer Sarkozy (c’est un « salopard » répétait-il à son sujet selon le livre de Laurent Binet). Un coup de balayette en quelque sorte. Il prétendit qu’en élisant un « président normal », le pays retrouverait un régime normal. On l’entendit même sur le plateau de « Des paroles et des actes » vanter la « mystique » de l’élection présidentielle qui devait le transfigurer. En quoi, il ne l’a pas dit. Sans doute pas en Pépère. Mais la mystique n’a pas marché. L’alternance n’a rien réglé. Avant que n’éclate l’affaire Cahuzac, le divorce entre le peuple et le pouvoir solférinien était déjà profond. C’est que le problème n’est pas celui d’un ni même de deux hommes, Sarkozy et Cahuzac. C’est le système qui est en cause. Nous avions donc raison de vouloir la 6e République. Nous avons raison de la vouloir encore. Et disons-le aussi, les Verts avaient raison l’an dernier de nous appeler à la lutte contre la corruption. S’ils ont choisi une magistrate anti-corruption comme candidate à la présidentielle plutôt qu’une personnalité connue pour son engagement sur les questions environnementales, n’était-ce pas qu’ils pensaient nécessaire de donner un coup de balai ?
Il faut donc reprendre notre marche vers la Sixième République. C’est la seule solution réaliste. On s’est cruellement moqué de Hollande, Monsieur Bricolage avec sa boite à outils. Mais tous ceux qui proposent de rafistoler une 25e fois la Cinquième République sont autant de Messieurs Bricolage. Rien de ce qu’ils proposent ne peut empêcher l’édifice de s’effondrer. Et les égouts de remonter alors à la surface. Il est urgent d’en finir, d’assainir l’atmosphère !
Que sera la Sixième République ? Nul ne peut le dire. Il ne faut pas avoir peur de cette incertitude. C’est celle de la démocratie. La nouvelle constitution sera l’œuvre du peuple. Le but d’une constitution est justement d’en assurer la souveraineté. C’est en son nom que des décisions légitimes –enfin !- peuvent être prises. C’est donc le peuple seul qui peut édicter la règle du jeu.
Il le fera en élisant une Assemblée Constituante. C’est une procédure logique et simple. Une telle Assemblée comprend des élus de droite, de gauche, de toutes sensibilités, chacun ayant présenté devant les électeurs ses options institutionnelles. Puis la Constituante rédige un projet de constitution qui est soumis au peuple par referendum. C’est son seul objet. L’Assemblée nationale actuelle pourra donc continuer à légiférer. Ainsi les citoyens éliront leurs représentants à la Constituante sur la seule base de leurs propositions pour la Sixième République. Bien sûr les parlementaires actuels ne pourront en être membres. On ne peut siéger dans deux assemblées en même temps. J’en signale une conséquence pour Xavier Bertrand qui présente Jean-Luc Mélenchon comme un être « assoiffé de pouvoir » : Jean-Luc ne pourra pas être élu à la Constituante. Mais Xavier Bertrand non plus. Je suppose que l’image du balai devient ainsi plus concrète.
Comment le peuple exerce-t-il la souveraineté ? Le plus souvent par l’intermédiaire de ses représentants. La Constitution doit donc garantir leur responsabilité devant le peuple. La Sixième marquera là une rupture majeure avec la Cinquième. Celle-ci a voulu un président politiquement irresponsable. Cet esprit d’irresponsabilité s’est ensuite diffusé dans tout l’édifice institutionnel dont le président est la clé de voûte. De plus, le temps politique s’est accéléré depuis 1958. Le raccourcissement du mandat présidentiel en tient compte. Mais cela ne suffit pas de voter tous les cinq ans quand le contexte politique peut changer tous les ans. Heureusement des instruments pratiques et concrets existent aujourd’hui pour permettre une souveraineté populaire continue. La créativité démocratique des peuples ne s’est pas arrêtée en 1958. Je pense notamment au referendum révocatoire qui est en vigueur dans plusieurs Etats des Etats-Unis d’Amérique, en Equateur ou au Venezuela. Ce referendum permet la révocation d’un responsable politique par ceux qui l’ont élu. Qu’il s’agisse d’un président, d’un maire ou d’un parlementaire. On voit son utilité immédiate dans l’affaire Cahuzac. Désir, Hollande, Bartolone ne cessent de dire que le retour de Cahuzac à l’Assemblée est inconcevable, que le Parlement en serait souillé et la France humiliée. Mais ils ne peuvent empêcher ce qu’ils présentent eux-mêmes comme un désastre démocratique et moral. Nous sommes dans un état de droit. La loi s’applique à tous de la même manière, Cahuzac compris. Ils ne vont tout de même pas donner son nom et son adresse en espérant que quelques excités règlent le problème en lui cassant la gueule ! Il paraît déjà qu’un pharmacien aurait refusé de lui délivrer des médicaments. Je réprouve ces méthodes de salopard dignes du blocus monétaire décrété contre le peuple chypriote par le gouverneur de la Banque Centrale européenne. J’y oppose la méthode démocratique et pacifique du référendum révocatoire. Dès lors qu’un seuil donné de l’électorat le demande, une majorité des votants peut décider la révocation. Il faudrait 10 ou 20% des inscrits pour le déclencher. Pas au bout de quinze jours bien sûr. Les Vénézuéliens ont estimé qu’un tel référendum ne devait être possible qu’à partir de la mi-mandat. Ils voulaient laisser ainsi le temps à l’élu de faire ses preuves et ne pas encourager l’instabilité institutionnelle. Cela se discute. J’en étais jusqu’ici convaincu. Mais l’expérience de Cahuzac pourrait me faire préférer un délai plus court. Parfois un an suffit pour réaliser que la personne élue ne fait pas l’affaire. Quoi qu’il en soit, ce sera à la Constituante d’en décider.
Face à cette idée, que proposent les tenants de la Cinquième République ? De pleurer ou de montrer les poings si Cahuzac revient à l’Assemblée, nous l’avons vu. Mais aussi de transformer les élections locales en référendums intermédiaires. Ce n’est pas moi qui le dis. C’est la porte-parole du gouvernement elle-même sur le plateau de Mots Croisés. Elle me répond quand je défends le référendum révocatoire que les Français pourront dire leur mécontentement par rapport à Hollande à l’occasion des élections municipales. Tel quel ! J’imagine la tête des maires PS qui entendent cela en même temps que moi. Ils ont dû la maudire. Mais cette imprudence est très révélatrice. Elle rappelle qu’aucun régime ne peut contenir l’expression du peuple. Les élections locales sont donc la soupape de sécurité de celui que nous subissons. Il faut bien que le désaveu tombe sur quelqu’un ! Au final, l’irresponsabilité du président prend tous les élus en otage. Voilà le parti solférinien pris en tenaille entre un président issu de ses rangs et la floppée d’élus locaux qui constitue sa seule trame réelle dans la société. L’échec de l’un, c’est la mort de tous les autres. Quand ça tient, la dissuasion est efficace. C’est marche ou crève : tout le monde rame dans la galère. Mais quand ça craque ? Cette contradiction a miné l’UMP, elle fera demain voler le PS en éclats. Mieux vaudrait que chaque élu soit responsable de son mandat et de lui seul. Ce serait plus démocratique et rationnel. Pour cela, il faut le référendum révocatoire.
Dans la Sixième république, le principe de responsabilité devra s’appliquer partout, à tous les responsables publics, au-delà des élus. Je pense par exemple au gouverneur de la Banque de France. Il est insupportable de l’entendre se présenter comme un « chef d’entreprise » alors qu’il gère un bien public des Français. Par ailleurs, c’est à lui que revient une grande part du contrôle de la finance. C’est la Banque de France qui a accordé une licence bancaire au groupe Reyl, chargé de l’évasion fiscale de Cahuzac. Devant qui en rend-il compte ? Si ces personnages ne sont pas sous le contrôle des parlementaires eux-mêmes contrôlés par le peuple, il ne faut pas s’étonner qu’ils finissent sous la coupe de la finance. A tous les niveaux, le contrôle populaire est bien la condition du rétablissement de la souveraineté. Cela conduira aussi à mettre un terme à l’inflation des autorités indépendantes à laquelle nous avons assistée sous la Cinquième République.
Le code génétique d’une Constitution ne se trouve pas dans des livres de droit constitutionnel mais dans la situation historique où elle a vu le jour. C’est parce qu’elle répond à leurs objectifs concrets que les citoyens peuvent consentir à une loi commune. En 1958, De Gaulle instrumentalisa le sentiment qu’un régime fort était nécessaire face à la crise algérienne. En 2013, l’intérêt général le plus impérieux et le plus évident aux yeux de tous est la réponse à l’urgence écologique. Notre loi commune doit être compatible avec les équilibres de l’écosystème. C’est simple, c’est une question de vie ou de mort. Mais comment y arriver ? Bien sûr il faudra se doter de normes environnementales et les faire appliquer par des inspecteurs adaptés. Mais la 6e République ne doit pas être 1984. Nous ne sommes pas de ceux qui veulent faire prospérer d’innombrables bureaucraties chargées de contrôler les élus plutôt que de confier cette tâche au peuple. Il en est de même pour la transformation de notre modèle de production. Nous ne pouvons pas mettre un inspecteur à la relocalisation derrière chaque carcasse de quadrupède. Ce sera aux salariés eux-mêmes de s’assurer que la production est bien écologiquement soutenable. Cela implique qu’ils soient convaincus que tel est l’intérêt général, qu’ils soient formés et éduqués à tous les niveaux du système scolaire à la prise en compte des interactions avec la nature. La Sixième République aura donc son projet scolaire comme la Troisième qui confia à son école la mission de produire des citoyens capables de voter et des hommes capables de se battre sous le drapeau. Cette responsabilité nouvelle des travailleurs implique aussi les droits qui vont avec. Vous souvenez-vous des prothèses mammaires PIP ? Les travailleurs de l’entreprise se doutaient que les produits utilisés étaient dangereux. Mais ils ne pouvaient rien dire de peur de perdre leur emploi ou briser leur carrière. La Sixième République donnera donc des droits aux citoyens dans l’entreprise : avis conforme sur toutes les décisions stratégiques de l’entreprise, protection face aux licenciements… Autre raison pour laquelle les droits des salariés sont devenus essentiels en 2013 : aujourd’hui 90% de la population du pays est salariée.
La Constitution de la Sixième république doit ensuite garantir la souveraineté du peuple face à toutes les menaces. En 1958, il s’agissait principalement du risque d’invasion étrangère. Le président de la République fut fait chef des armées, et son élection au suffrage universel lui donna la légitimité d’appuyer sur le bouton nucléaire. Mais aujourd’hui, il faut aussi faire face à des menaces nouvelles. Le poids du secteur bancaire en est une. On a beaucoup glosé sur Chypre et ses actifs bancaires huit fois supérieurs à la richesse du pays. Mais en France les banques pèsent quatre fois le PIB. Une défaillance bancaire emporterait le budget de l’Etat. Il faut donc un chapitre de la Constitution chargé de protéger la société et organiser ses relations avec les banques : rôle d’une Banque de France replacée sous contrôle démocratique, séparation des activités bancaires (contrairement à la loi Moscovici qui porte frauduleusement ce nom), mécanismes démocratiques et transparents de garantie bancaire et de faillite ordonnée…
Faut-il faire la liste de tout ce qui a changé depuis 1958 ? Le paysage médiatique par exemple. Il y avait alors sur le sol national trois chaînes de radio et une chaîne de télévision, toutes publiques. C’est trois fois moins qu’en Corée du Nord aujourd’hui. Un ministère assurait le contrôle de ces chaînes. Aujourd’hui le monde médiatique français n’a plus rien à voir. Comment faire en sorte qu’il assure le droit à une information la plus complète, pluraliste et sérieuse possible des citoyens ? C’est un enjeu démocratique essentiel que la Constitution nouvelle doit prendre en charge. En 1958, il n’y avait pas Internet. La Sixième République innovera en étant la première à inscrire la neutralité des réseaux comme un principe constitutionnel. En 1958, il n’y avait pas comme aujourd’hui une majorité de femmes qui travaillent et ont aussi gagné la maîtrise de leur corps. La Sixième République sera donc intégralement paritaire.
En 1958, il n’y avait pas non plus l’Union Européenne. Le lien de notre Constitution avec les textes de l’UE a fait l’objet de nombreux bricolages sous l’égide du Conseil Constitutionnel. Je propose d’adopter une règle simple tirée de la Constitution irlandaise : tout transfert de souveraineté ne pourra être décidé que par referendum. Ainsi, nous éviterons la forfaiture du traité de Lisbonne, qui donna à l’oligarchie ce goût de revanche proportionnel à la frousse subie au soir de la victoire du « non » en 2005. Cette disposition constitutionnelle aura aussi l’avantage de renforcer la place de la France en Europe. Aucun traité ne pourra méconnaître les exigences du peuple français. Regardez comment les Allemands imposent plus facilement leurs vues du fait que tous les plans de sauvegarde doivent passer devant le Bundestag. C’est comme cela aussi que le plan chypriote est devenu un plan allemand : le Parlement chypriote n’a pas eu le droit de le voter tandis que le Parlement allemand aura à le faire.
Oui bien sûr la Sixième République doit aussi être parlementaire. Car nous savons qu’un collectif est plus intelligent qu’une personne seule et que seule la publicité des débats permet d’impliquer le peuple. Mais ne cherchez pas cette Constitution dans un livre. Elle n’a pas de modèle car elle répond à des défis nouveaux. Elle sera aussi innovante que la constitution de Bolivie ou d’Equateur. C’est nous tous qui l’écrirons. Cela commence le 5 mai prochain avec ce que vous mettrez sur votre pancarte.
Le Parti de Gauche salue le triomphe exemplaire de l’égalité des droits en Uruguay
71 voix pour sur 92 votants. Le vote est sans appel. Il est historique.
L’Uruguay est devenu ce mercredi 10 avril le deuxième Etat latino-américain (après l’Argentine) et le douzième Etat du Monde à adopter une loi nationale ouvrant le droit au mariage à toutes et à tous.
Le projet de loi, venu du collectif citoyen des « Moutons noirs » et soutenu par le gouvernement du Frente Amplio et son président José Mujica permet non seulement aux conjoints de se marier quel que soit leur genre mais aussi de reconnaître la filiation fondé sur l’engagement avec transmission du nom des deux parents pour enfants nés dans le cadre d’un mariage entre personnes homosexuelles ainsi que le droit pour les couples homosexuels d’adopter ensemble des enfants.
Il consacre donc aussi l’égalité des droits pour les enfants de couples homosexuels et le droit des enfants en attente d’adoption à être élevés par des parents aimants quel que soit leur sexe.
A l’heure où, en France, le Sénat vient juste d’adopter en première lecture le projet de loi « a minima » sur le mariage et l’adoption homoparentale qui avance à grand peine dans la navette parlementaire en laissant le temps de se déployer à diverses manifestations d’homophobie dans le pays, la démonstration de volonté politique et de détermination de la gauche en Uruguay fait exemple.
Nous félicitons le Frente Amplio et le Parlement uruguayen pour ce vote historique.
Le Cri du Peuple • « Nouveau pacte majoritaire » ? Chiche. Rendez-vous le 5 mai !
Ainsi donc, depuis son intervention vendredi dernier, nous avons retenu de Jean-Luc Mélenchon que le Front de Gauche met à disposition de celles et ceux qui le veulent une marche citoyenne pour conquérir la 6e République. Moi-même j’en ai fait l’écho de manière discrète (permettez que je manie un tant soit peu l’autodérision). Mais Jean-Luc concluait aussi son propos en rappelant que les conditions existent, dans notre pays, pour mener une autre politique que celle de l’austérité et du renoncement face à l’oligarchie. Il a même précisé qu’une majorité politique existe à l’Assemblée comme au Sénat pour ce faire.
J’ai contribué à occulter cet aspect, pourtant majeur, de son propos. A savoir que les conditions politiques existent pour permettre que la volonté populaire, que nous entendons aider à faire émerger dans le débat, soit traduite en actes le lendemain. C’est à cette aune qu’il faut lire les récentes déclarations de ténors socialistes tels que Marie-Noëlle Lienemann ou Emmanuel Maurel. Les deux ont appelé à un « nouveau pacte majoritaire » au sein de la gauche. Une démarche que soutient un député qui m’est cher :
@nathanaeluhl Je soutiens l’idée du nouveau pacte majoritaire
— Razzy Hammadi (@RHammadi) 12 avril 2013
Les analyses des animateurs de l’association (le mot est important) Maintenant la gauche rejoignent celle d’Arnaud Montebourg. « Le sérieux budgétaire, s’il tue la croissance, n’est plus sérieux », a assuré mardi, le ministre du Redressement productif, qui veut en finir avec l’austérité. Marie-Noëlle Lienemann a été particulièrement claire :
La majorité qui a fait François Hollande président de la République doit pouvoir avoir des convergences pour un nouveau pacte majoritaire pour qu’on reparte sur un nouveau pied car, sinon, ça risque d’être et l’enlisement économique et social et l’enlisement politique.
Ainsi donc, même au sein du parti solférinien, des voix se lèvent pour condamner la politique attentatoire aux intérêts du peuple que mène le gouvernement. En effet, après Montebourg, c’est l’ancien héraut de feu la gauche du PS qui a renchéri, quoique d’une manière plus feutrée : « Je fais partie de ceux qui considèrent que cette politique menée par la droite allemande va conduire l’Europe dans une impasse », a en effet soutenu mercredi matin sur BFMTV Benoît Hamon. Selon lui, cette politique est « incapable de proposer autre chose que des sacrifices qui va aboutir sur plus de chômage et de pauvreté ». Sous le vocable « politique menée par la droite allemande », il faut bien comprendre qu’il parle du binôme Hollande-Ayrault. Ce dernier ne s’y est pas trompé qui a violemment recadré l’ensemble des voix discordantes.
(Photo : Stéphane Burlot)
A en croire Emmanuel Maurel, ces voix sont de moins en moins rares. Je lui laisse donc la parole :
Je constate que de plus en plus de voix s’élèvent dans la majorité pour dire que (l’austérité) n’est pas forcément l’alpha et l’oméga de la politique économique. Je me réjouis de constater que la quasi totalité des socialistes aujourd’hui reconnaissent que l’austérité en Europe nous mène tout droit à la catastrophe. (…) On doit tirer aujourd’hui les conclusions politiques de ces critiques, de cette nouvelle donne, et traduire concrètement dans la politique nationale cette inflexion que l’on souhaite au niveau européen. Au moment où on s’apprête à fêter le premier anniversaire de l’élection de François Hollande, il est nécessaire de passer à une nouvelle étape en termes de politique économique et sociale. Je souhaite aussi une nouvelle étape dans l’organisation de la majorité.
Je ne veux pas tirer la couverture à nous autres, front de gauchistes, mais ces propos sont-ils opposés, différents même, de ceux tenus par Mélenchon quand il dit qu’il y a une majorité pour mener une autre politique ? Pour ma part, je considère qu’Emmanuel, que j’ai connu (pas de près) il y a quelques années, et Marie-Noëlle ont saisi la perche que nous leur tendions il y a une semaine.
Déjà, à l’époque,; nous défendions ensemble la 6e République
Certes, ami lecteur (genre neutre), tu vas me répondre que, depuis, ils ont voté l’ANI. Je fais partie de ceux qui, à l’instar de Marie-Georges Buffet et Pierre Laurent, saluent le fait qu’ils n’aient pas voté pour l’ANI. Dans les conditions de brutalité du débat, brutalité résumée par Bruno Le Roux en « personne n’est obligé d’être membre du groupe PS », c’est déjà un acte de courage. A présent, après la réponse verte adressée par Ayrault aux doléances des amis de Maintenant la gauche, il n’est guère utile que de laisser la réponse à Marie-Georges Buffet :
J’ai envie de dire à ces hommes et ses femmes qui sont à la gauche du PS, qui ont envie que le PS retrouve une politique réellement de gauche et non pas une politique à la Sarkozy-Merkel, j’ai envie de leur dire, rejoignez-nous ! Je ne leur demande pas de quitter le PS, chacun est attaché à son parti c’est tout à fait normal, mais venez à la manifestation du 5 mai ! Soyez du bon côté de la barricade, rejoignez-nous !
Allez, les ami-e-s, nous vous pensons sincères. Allons ensemble au débat et prenons la rue pour faire entendre la voix de la classe ouvrière, pour faire entendre le cri du peuple.
« Le Monde » cache la vérité à mon sujet !
Pourquoi le journal « Le Monde », dans son édition avec vente forcée du supplément du week end, cache-t-il à ses lecteurs l’existence de ma maison de campagne dans le Loiret ?
Méprise-t-il ce département ? Faut-il avoir une maison à Valloris plutôt qu’à Montargis pour être digne du grand journal de révérences ?
Au lieu d’inventer que j’ai refusé de publier mon patrimoine en début de semaine alors qu’il est public depuis un an, au lieu de m’attribuer une humeur joyeuse que je n’ai jamais exprimée ou une volonté que je n’ai jamais eue de dire « tous pourris sauf moi », le journal « Le Monde » ferait mieux de reconnaître toute ma dignité de propriétaire.
Et de se souvenir que même dans la volonté de nuire il faut un certain professionnalisme.
En attendant la publication du patrimoine des responsables de la rédaction du Monde qui permette peut-être de comprendre pourquoi c’est dans Mediapart qu’il faut aller chercher les informations gênantes pour les puissants.