Le grand chaos
Virage sur l’aile de Jean-Marc Ayrault. Alors qu’il se contentait de répéter que la TVA serait augmentée au 1er janvier, le voilà qui annonce la « remise à plat » fiscale. Cela ressemble plus à une turbulence qu’à un changement de cap. Rarement un chantier de cette importance aura été lancé dans une telle confusion. La cause en est simple. Hollande, après qu’on l’ait vu s’occuper en direct à la télévision des conditions du retour de Leonarda, reste obstinément silencieux sur ce qui fut sa promesse centrale depuis la primaire socialiste. Cahuzac s’engouffra dans ce mutisme béant en annonçant que la grande réforme fiscale promise par Hollande était achevée. Moscovici souffla ensuite sur les braises du « ras-le-bol fiscal ». Hollande promit la pause pour 2014, Ayrault le contredit en parlant de 2015. Un nouveau palier dans le désordre balaya ces controverses quand la pause fit place à ce grand chambardement. Pour 2015 annonce Ayrault. Ça prendra le temps du quinquennat corrige Hollande en déplacement en Italie. Qui croire ? Si c’est le chantier du quinquennat, c’est à Hollande d’annoncer ses intentions plutôt qu’au sursitaire de Matignon.
Le chaos est au pouvoir. Après que des élus PS aient réclamé publiquement sa tête, Ayrault cherche sans doute un sursis en s’installant comme pilote d’une réforme au long cours. Qu’en penser pour ce qui nous intéresse, l’indispensable révolution fiscale ? D’abord les orientations de l’exécutif sont toujours floues et parfois très inquiétantes. Hollande a déclaré que l’un des objectifs de la réforme devait être la compétitivité, synonyme dans sa vision étroite de baisse de la contribution des entreprises, notamment les grosses tournées vers les marchés étrangers. Moscovici avait déjà promis au MEDEF de futures baisses de cotisations patronales. Le gouvernement lorgne notamment sur les prestations familiales, financées exclusivement par les cotisations des employeurs, qu’il a commencé à rogner. De tels projets, de même qu’un changement du mode de financement de la protection sociale, expliquerait pourquoi la réforme commence par des entretiens avec les organisations patronales et les syndicats de salariés.
Ensuite, la méthode d’Ayrault recèle une arnaque fondamentale. La position des organisations syndicales et professionnelles sur les questions fiscales est connue. C’est un sujet sur lequel elles ne manquent pas de propositions… contradictoires. Les syndicats salariés récusent ainsi unanimement la hausse de la TVA, comme l’Union Professionnelle des Artisans. Le MEDEF la promeut de longue date. Les syndicats salariés plaident pour une augmentation des cotisations patronales. Le MEDEF la refuse avec obstination. Ce n’est pas surprenant : dans le partage des richesses, il n’y a pas d’accord « gagnant-gagnant », il y a le résultat de la lutte et du rapport de forces. Le gouvernement ne peut donc se contenter de faire la synthèse d’un tour de table. Il doit s’engager d’un côté ou de l’autre et ne peut le faire qu’au nom de l’intérêt général. S’il se tait ou multiplie les messages opposés, nous savons ce qu’il a fait jusqu’ici. Sur les retraites, il a satisfait le MEDEF. Sur la TVA aussi. Contrairement dans les deux cas aux promesses faites aux Français.
Il est significatif que le pouvoir prétende ouvrir un chantier aussi brûlant en dénonçant la mobilisation du Front de gauche le 1er décembre mais en s’accommodant de celles organisées par les secteurs patronaux. Ce sont des organisateurs de défaites. En marchant sur Bercy dimanche, nous ne commettrons pas la bêtise de contempler leur déroute.
Réforme fiscale • A peine annoncée, déjà reportée
Après des mois passés à annoncer par la voix de divers ministres et du président lui-même que le temps de la réforme fiscale était terminé, le 19 novembre le premier ministre a tout d’un coup déclaré qu’il était nécessaire de tout remettre à plat. Une lueur de lucidité ? Ou plutôt une tentative de sortir par le haut d’une situation où le gouvernement est coincé entre poujadisme fiscal d’un côté et exaspération à gauche et au niveau syndical face aux reculades constantes devant les exigences de la finance et de divers lobbies ? Jean-Marc Ayrault, dans son interview aux Echos, annonçait donc cette réforme pour le budget 2015. Cet engagement n’aura duré qu’une journée. Le lendemain, François Hollande indiquait « la réforme fiscale prendra le temps du quinquennat » ! Une fois de plus, la tête de l’état donne l’impression de ne pas savoir ce qu’elle veut.
Par contre, il y a bien un principe libéral sur lequel ce gouvernement ne lâche pas : « Revenir sur la hausse de la TVA pour certains secteurs, ce serait revenir sur la baisse du coût du travail ». Quelle fermeté ! Et quelle différence avec les reculs sur la fiscalité en direction des plus riches. Des études parues ces derniers jours démontrent toutes que la fiscalité, dans son ensemble, s’est alourdie sur les ménages et allégée pour les entreprises. Avec ses reculades, le PS est en train de valider l’idéologie libérale du moins d’impôts. Aussi, catégories après catégories, tous les intérêts corporatistes partent à l’assaut.
C’est maintenant au tour des céréaliers de bloquer Paris contre la réforme de la PAC, dont le seul aspect positif est justement de rééquilibrer un peu les aides alors que jusqu’ici elles favorisent surtout les exploitants les plus riches, surtout les céréaliers, aux dépens de tous les autres agriculteurs et des éleveurs ! Après la mobilisation contre l’écotaxe et pour la défense du modèle agroalimentaire productiviste, la FNSEA défend maintenant les gros contre les petits. Pas de surprise. Mais il serait temps que ceux qui ont appelé à manifester à Quimper derrière ce syndicat, se rendent compte qu’on ne peut pas défendre les droits des salariés, des petits agriculteurs et l’environnement aux côtés de ceux qui ont toujours été les premiers défenseurs du modèle libéral et productiviste.
Quant à la réforme fiscale, il ne faut rien lâcher, car une réforme fiscale avec comme base la poursuite de la baisse du coût du travail et des dépenses publiques ne peut se faire qu’au détriment des salariés.
La marche du 1er décembre à l’appel du Front de Gauche, contre l’austérité, pour la taxation du capital, pour l’annulation de la hausse de la TVA, est donc encore plus d’actualité.
Martine Billard,
co-présidente du Parti de Gauche
Quelle belle semaine pour…la droite!
En une semaine, en 5 jours, d’un lundi 18 novembre à un vendredi 22 novembre, la droite française aura obtenu ce qu’elle n’avait pas fait, ou presque, en 10 ans. Ce gain obtenu par la droite française est le fruit d’un don inestimable pour elle du gouvernement de « gauche » de Jean-Marc Ayrault sous la présidence de François Hollande. On exagère? Et bien pour démontrer notre propos, nous n’allons même pas analyser l’actualité politique de cette semaine, nous allons nous contenter de l’énumérer. Cependant, sachez le, cette énumération permettra à elle seule de dévoiler ce qu’est désormais le parti au pouvoir, pas à travers les mots qu’il prononce via une aile droite ou une aile gauche, mais au travers de ses actes.
Pudiquement, l’air de rien, comme si de rien n’était, lundi 18 novembre le premier ministre annonce une remise à plat de la fiscalité. Enfin la promesse de Big Bang fiscal de Hollande au meeting du Bourget, enfin la guerre à la finance va commencer. Enfin, la gauche est entendue! Et bien pas vraiment. La mise à plat de la fiscalité consiste à poursuivre la politique insensée d’austérité et de rigueur. Ainsi, apprenons nous, comme ça, l’air de rien, comme si de rien n’était, 15 milliards d’économie sur le budget de fonctionnement du pays en 2015, en 2016, en 2017. La droite est exaucée!
Pudiquement, l’air de rien, comme si de rien n’était, mardi 19 novembre, le ministre du travail, Michel Sapin, déclare les élections des conseillers des prud’hommes trop chers. La représentation démocratique des salariés dans une instance supposée réguler les conflits dans le monde du travail a donc un prix. Et ce prix vaut pour suppression pure et simple de l’élection démocratique. Ainsi, les magouilles entre amis vont pouvoir se dérouler à l’abri des regards indiscrets, ainsi, le rapport de force au sein des prud’hommes ne sera plus le fruit d’un vote mais de tractations. A ce jeu chacun sait qui est le plus fort: le Medef. Avec l’Ani hier et la suppression de l’élection par les salariés des conseillers aux prud’hommes la droite est exaucée!
Pudiquement, l’air de rien, comme si de rien n’était, mercredi 20 novembre, le ministre de l’économie, Moscovici, annonce la nomination à la tête du trésor d’un cadre dirigeant de la banque BNP. Ainsi, découvrons nous que notre haute fonction publique, qui se vise pour objectif, en théorie, le service rendu au public et aux citoyens, n’est pas assez compétente. Ainsi et surtout découvrons nous que sous l’ère Hollande, le trésor de la nation sera géré par un cadre de la finance qui en connaît toutes les ficelles. Nous apprenons donc la mise sur les marchés financiers du trésor de la France. La droite est exaucée!
Pudiquement, l’air de rien, comme si de rien n’était, vendredi 22 novembre, le gouvernement annonce que le vote sur le projet d’allongement de la durée de cotisation sur les retraites sera un vote bloqué! Et pourquoi donc? Parce que le Sénat avait ouvert une brèche énorme en repoussant en bloc ce projet et avait ainsi démasqué l’aile gauche du parti socialiste qui s’était abstenue quelques jours plus tôt, permettant ainsi à la loi de passer. Désormais à visage découvert, la voilà, cette aile gauche du PS, contrainte de voter contre car elle n’a plus aucune excuse si elle veut encore prétendre au « label rouge » qui rend éventuellement crédible les discours sur la défense des classes populaires et moyennes. Rappelons pour mémoire, et quand même aussi pour rigoler un peu face à autant de tragique et de faillite politique, qu’en 2010 le parti socialiste dans sont entier dénonçait fermement la pratique du vote bloqué quand « l’incarnation du mal à droite » l’utilisait pour faire passer une injuste réforme des retraites. Cet homme s’appelait Nicolas Sarkozy. Mais depuis, la promesse 60 du parti socialiste a volé en éclat! Finalement, la droite est exaucée!
Pudiquement, l’air de rien, comme si de rien n’était, au lendemain d’un conseil national qui devait, au PS, investir les candidats aux élections municipales et européennes, Solférino adresse un message limpide aux socialistes qui peuplent encore la rue de Solférino: rentrez dans le rang! Ils indiquent clairement que leurs mots, leurs écrits, leurs réunions ne servent à rien. Ils affirment hautement que les quelques récompenses de postes obtenues ça et là par les rares socialistes qui campent encore au PS ne signifient en rien qu’ils deviennent des « Personna Grata ». Enfin ils indiquent ce que sera la politique du gouvernement socialiste au lendemain des élections municipales et européennes. Cette politique sera conforme aux exigences de Bruxelles et les municipalités, frappées par l’austérité, n’auront plus qu’à suppléer la carence de l’état
. A celles et ceux qui y croient encore à ce parti au pouvoir qui exauce tous les désirs d’une droite qui ne lâche rien et et accentue chaque jour la pression chaque fois qu’il y a recul, au travers des bonnets rouges lou des « manifestants pour tous », au travers des geonpis ou du Medef, il est temps de le leur dire: »vous allez tomber de haut ». Car cette semaine, comme les semaines précédentes et comme les semaines qui viendront, à la fin, la droite est exaucée! Alors, lorsqu’au congrès « socialiste » de 2015, à l’issue d’une sombre nuit des résolutions le résultat tombera, la défaite sera totale. L’aile droite sera, comme toujours, exaucée!
Vinci, SNCM : le double jeu de la Commission européenne
Crédit photo photosdegauche.fr (michel_soudais)
Marie Batoux et Corinne Morel Darleux, du Parti de gauche, soulignent l’incohérence, selon elles, des décisions prises à Bruxelles, qui autorise l’Etat français à aider la filiale du groupe Vinci en charge de Notre-Dame-des Landes, mais pas la SNCM, qui assure le service public de transport entre la Corse et le continent.
A Bruxelles, la concurrence est libre et non faussée… Enfin, ça dépend des fois. C’est ainsi qu’on apprend que la Commission européenne vient d’autoriser l’État français à verser 150 millions d’euros à la filiale de Vinci en charge de la réalisation de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, et dans le même temps qu’elle réclame en tout 440 millions d’euros à la SNCM pour remboursement d’aides du même État.
Voilà qui a de quoi étonner. D’un côté, le groupe Vinci, qui en 2011 affichait 1,9 milliard de résultat net. De l’autre, la SNCM, compagnie d’utilité publique, dont le chiffre d’affaires annuel n’atteint pas le seuil des 440 millions que lui réclame aujourd’hui la Commission européenne !
Pour que la SNCM redevienne un service public, il faut désobéir à l’Union
Celle-ci s’appuie, pour réclamer cette somme à la SNCM, sur la requalification en aides d’État de la recapitalisation au moment de la vente. La Commission européenne justifie ainsi la décision : « Les interventions des pouvoirs publics en faveur d’entreprises peuvent être considérées comme ne constituant pas des aides d’État au sens des règles de l’UE dès lors qu’elles sont effectuées à des conditions qu’un opérateur privé guidé par les critères du marché aurait acceptées (principe dit de l’investisseur en économie de marché) ». Mais quel opérateur privé dans un système capitaliste privilégie la continuité de service public plutôt que ses profits ? Les salariés en lutte, qui se font traiter de « mafieux » pour vouloir maintenir les traversées et l’emploi, le savent : la Corse n’est pas qu’une destination touristique ! 300 000 personnes y vivent, et plus du quart des natifs corses vivent sur le continent. Tous se déplacent toute l’année entre PACA et la Corse. Toutes et tous sont nos concitoyens et vivent sur le territoire de la République française. Ils ont droit à la mobilité et à la continuité d’un service public des transports ! Seulement voilà, en période « basse », cela est bien moins lucratif. Alors qui va prendre en charge des traversées nécessaires mais peu, voire pas rentables ? Pas le concurrent direct Corsica ferries, c’est certain. Il serait plus que temps de revenir à un véritable service public de transport entre la Corse et le continent.
Ce qui de fait n’est pas tout à fait le cas : l’attaque de la Commission européenne s’inscrit en réalité dans un contexte de délégation de service public attribuée en septembre à la SNCM. Rappelons que le capital de la SNCM a été ouvert au privé par le gouvernement de Villepin, permettant ainsi à Veolia, numéro un mondial de l’eau et des déchets de devenir actionnaire indirect de la SNCM par l’intermédiaire de Transdev, sa co-entreprise avec la Caisse des Dépôts, qui détient 66 % du capital. On est donc loin d’un monopole de service public. Pourtant, la Commission européenne se montre beaucoup moins sourcilleuse quand il s’agit des 150 millions d’euros perçus par Corsica ferries de la part de l’Etat français par le biais de l’aide au passager. C’est d’ailleurs ce groupe, écarté de la délégation de service public, qui avait déjà saisi la justice européenne en 2007.
Corsica Ferries bénéficie pourtant déjà d’un « avantage concurrentiel » grâce à la mise en concurrence entre travailleurs organisée par l’Union européenne, qui permet aux compagnies low-cost de faire du dumping social. Quand une compagnie maritime peut choisir le registre de son pavillon, la Commission lui permet en réalité de respecter ou non le droit du travail français. Démarche singulière qui permet à des opérateurs privés de contourner les lois françaises pour assurer une traversée d’un port français à un autre port français. En choisissant un pavillon de régime international, une compagnie peut ainsi recruter un personnel qui ne parle pas la même langue, ne pas respecter le salaire minimum défini par la loi française et les droits des travailleurs.
Il faut donc changer ces règles européennes, ou leur désobéir. Le ministre Cuvillier l’avait promis à sa dernière visite à Marseille, il ne laisserait pas couler la SNCM. Il est temps de passer du double discours aux actes clairs. … lire la suite sur Mediapart
Bretagne: les Bonnets rouges siphonnés par l’extrême-droite
Les Bonnets rouges ont bien du mal à endiguer la récupération de leur mouvement par l’extrême-droite. Un groupuscule identitaire lance une souscription estampillée du couvre-chef breton, après avoir tenté de récupérer la propriété de la marque « bonnets rouges ».
Le mouvement de contestation breton a bien du mal à endiguer la récupération de l’extrême-droite. Malgré l’annonce d’une charte (toujours en attente) « pour que ces gens-là ne puissent pas se retrouver dans notre combat », et les dénégations du maire de Carhaix Christian Troadec -« On refuse le soutien de Le Pen ou du FN, on n’en a pas besoin, il n’est pas question que ces gens puissent se rallier -dans Libération)- les leaders des 30.000 manifestants à Quimper fin octobre perdent chaque jour du terrain face aux coups de boutoir de groupuscules dans la mouvance du Front national.
Le Parti de Gauche soutient les mobilisations du 23 novembre en Bretagne
L’ampleur des destructions d’emploi dans les filières agricoles et industrielles en Bretagne n’est pas une fatalité.
Alors que les solutions à ces drames sociaux résident dans la relocalisation de l’emploi, la remise en cause du cadre de concurrence européenne, et le financement de la transition écologique par une révolution fiscale, le Gouvernement se borne à un face à face avec un patronat cynique qui ne fait que demander encore et toujours plus d’exonérations et de flexibilité du travail.
Pour affirmer leurs revendications à l’abri du cynisme patronal qui licencie et qui pollue, les syndicats appellent aujourd’hui à se mobiliser dans les 4 départements Bretons :
A Lorient (10h30), à St-Brieuc (10h30) à Rennes (11h), et à Morlaix (15h).
A la suite de la manifestation du 2 novembre à Carhaix qu’il avait amplement soutenu, le Parti de Gauche sera présent aux 4 manifestations départementales du 23 novembre.
Raquel Garrido, Secrétaire Nationale du PG, sera présente à Rennes à 11h et à Morlaix à 15h.
COP19 • Conférence climat à Varsovie : du privé, du charbon, et au final… du vent
Déclaration du Parti de Gauche.
Les grandes puissances mondiales étaient réunies à Varsovie pour la 19e conférence des parties (COP), sommet de négociations internationales sur le climat qui vient de s’achever ce 22 novembre. Alors même que l’Organisation Météorologie Mondiale (OMM) vient d’annoncer un nouveau pic exceptionnel de concentration de Co2 dans l’atmosphère, ce fut une fois de plus le bal des incapables.
La conférence était déjà mal engagée avec l’introduction de grandes entreprises privées – dont Arcelor Mittal ou BMW – dans le cycle des négociations… Et jusqu’au mobilier ! Le Réseau Action Climat a ainsi témoigné de la surprise des délégués découvrant des distributeurs d’eau siglés Alstom et des fauteuils Emirates ! Elle s’est mal poursuivie avec l’absence marquée de remise en cause du fonctionnement du marché carbone. Elle s’est enfin très mal terminée avec le retrait de la conférence des grandes ONG et associations environnementales (Greenpeace, WWF, Oxfam, Amis de la Terre entre autres), mais aussi de la Confédération syndicale internationale (CSI-ITUC) la veille de la clôture, toutes regrettant qu’une fois de plus cette conférence n’ait abouti qu’à du vent.
Comme si ne suffisait pas la proposition ahurissante de la Pologne d’un « sommet du charbon et du climat », les États-Unis ont encore pesé lourd dans la balance en refusant tout accord contraignant ainsi que tout traitement différencié des pays développés et des pays en développement. « Il faut laisser l’idéologie à la porte » a même déclaré le négociateur américain Ted Stern. Ainsi la prise en charge de la responsabilité qui leur incombe est balayée d’un revers de la manche par les États-Unis.
Le Canada, le Japon et l’Australie ont quant à eux révisé à la baisse voir carrément effacé de leurs tablettes tout objectif contraignant. L’Union européenne fait du sur-place, et les ministres français Pascal Canfin et Laurent Fabius répètent en chœur que le gouvernement français veut « un accord applicable à tous, juridiquement contraignant et ambitieux, c’est-à-dire permettant de respecter la limite des 2 °C ». En l’absence de toute volonté politique internationale et au vu de la politique en matière d’écologie du gouvernement Ayrault, cela prêterait à sourire si ce n’était pas d’urgence climatique dont il était question !
Il sera dès lors difficile de trouver un point d’accord sur la feuille de route pour le sommet de Paris de 2015, et encore plus de voir les pays développés s’engager concrètement dans le sens de la mise en place d’un objectif intermédiaire en ce qui concerne l’aide apportée aux pays en développement et les 60, puis 100 milliards de dollars par an promis lors de la conférence de Copenhague.
On le constate une fois encore, l’Union Européenne est paralysée par son credo libéral, qui l’empêche tout à la fois de reconnaitre l’inefficacité du système d’échange des quotas d’émission (SEQE) et de proposer d’une même voix d’autres solutions. Pire, elle s’obstine : nulle trace, dans le rapport du parlement et du conseil européen sur la conférence de Varsovie, de la mise en place d’un tribunal climatique au niveau international. Ce rapport est resté enfermé dans la promotion aveugle du marché carbone et des mécanismes de marché pour résoudre la crise climatique. Les mêmes recettes libérales qui ont prouvé leur incapacité ont donc encore et toujours la faveur de l’Union Européenne. Et il n’a choqué aucune de ces belles personnes que cette conférence de Varsovie fasse la part belle aux grands industriels internationaux, qui sont les principaux pollueurs-bénéficiaires au niveau de l’Union Européenne de ces mécanismes de marché.
À regarder la crise climatique par le petit bout de la lorgnette en privilégiant les intérêts financiers et de court-terme, les négociations entre grands oligarques de la planète sont vouées à l’échec. À ce stade de main mise des multinationales et de leurs représentants sur les négociations internationales, nous n’avons jamais eu autant besoin que se lève un grand mouvement citoyen et que se réalise l’unité des forces sociales et écologiques. Eux seuls semblent encore en mesure d’inverser le cours des choses.
Le Parti de Gauche et ses militants s’engagent à tout mettre en œuvre pour y contribuer.
15 novembre 1884
C’est paradoxalement à Berlin que commence à s’écrire, avec l’ouverture d’une conférence le 15 novembre 1884, le destin de l’Afrique contemporaine. Les douze principales puissances européennes, du Portugal à la Russie, plus l’Empire ottoman et les Etats-Unis, se réunissent autour de Bismarck pour organiser le partage du continent noir. Comme l’annonce joliment l’Acte principal de cette conférence « au nom du Dieu Tout-Puissant », il s’agit de « régler, dans un esprit de bonne entente mutuelle, les conditions les plus favorables au développement du commerce et de la civilisation dans certaines régions de l’Afrique, et (…) de prévenir les malentendus et les contestations que pourraient soulever à l’avenir les prises de possession nouvelles (…) » Une opération en somme de diplomatie européenne, à laquelle aucun Africain n’est convié, qui doit prévenir les frictions suscitées par la trop grande avidité et rivalité des prédateurs européens.
Car s’il n’est pas encore question de colonialisme – l’Afrique est alors très imparfaitement connue et les investissements semblent trop faramineux pour être un jour rentables -, les grandes puissances cherchent à acquérir des zones-clés favorables à leur commerce ou à occuper un maximum d’espace pour bloquer l’adversaire. France et Grande-Bretagne en particulier se marquent à la culotte et organisent des expéditions qui ont pour mission de signer des traités d’amitié et de protectorat avec les chefs locaux de façon à se constituer des zones d’influence. Ainsi commencent à se tracer au cordeau des lignes, des frontières qui ne correspondent guère à de quelconques réalités, mais qui seront source de conflits ultérieurs entre Africains même.
La conférence de Berlin entérine ainsi le partage du bassin du Niger entre la Grande-Bretagne et la France, celui du Congo entre cette dernière (500 000 km2) et Léopold II, roi des Belges, lui un réel visionnaire du colonialisme, qui accapare à titre personnel pas moins de 2,5 millions de km2… Alors qu’en 1880, les Européens n’occupent que 1/10 de l’Afrique, 20 ans plus tard, elle le sera dans sa totalité.
Partenariats public-privé • Plus chers, moins performants, antidémocratiques
Depuis dix ans, le recours aux partenariats public-privé (PPP) explose. Ces contrats permettent à la puissance publique, notamment les collectivités territoriales, de confier à un opérateur privé le financement, la construction et l’exploitation d’un équipement pour une durée déterminée. Les élections municipales sont l’occasion de lancer une offensive contre cette capture par les grands trusts d’investissements essentiels pour la vie quotidienne. Présentés comme la preuve de l’efficacité supérieure de l’initiative privée sur l’intervention publique, les PPP démontrent en fait le contraire.
Précarité et mauvaise qualité
Les PPP conduisent tout d’abord à une moindre qualité. Pour les salariés, ils accroissent les inégalités. La personne publique recourt à des consultants, les mêmes qui travaillent à construire l’offre des groupements privés, d’où une rente pour les consultants employés par les deux parties. On voit petit à petit une imposition « douce » des méthodes du management privé et des conditions de travail dégradées qui vont avec. La rémunération exorbitante d’experts financiers et juridiques impose (à budget constant) une précarisation du personnel d’entretien. C’est la fin de l’échelle des salaires resserrée de la fonction publique.
Les usagers sont aussi perdants. L’organisation en flux tendu avec des ressources limitées (pour accroître les profits), produit des services de qualité réduite. Dans le cas de l’université Paris-Diderot, par exemple, premier PPP de cette ampleur dans l’enseignement supérieur, le tribunal administratif a déclaré la moitié des bâtiments inaptes à l’accueil du public, car Vinci s’est affranchi des règles de sécurité incendie. Bilan, ce défaut de qualité dans des bâtiments déjà occupés par les étudiants va entraîner des délais et des travaux presque aux seuls frais de l’université.
Un coût plus important
Et c’est la source du deuxième échec des PPP : selon la Cour des Comptes (2008), ils demeurent beaucoup plus chers au final, notamment car la dépense est étalée sur plusieurs années. Voilà où conduit l’idéologie hostile à l’endettement public : ne pas emprunter de somme élevée à court-terme amène à payer bien plus au final en cachant le prix réel. L’effet-prix réapparaît au niveau de l’emprunt, plus cher pour de nombreux groupes privés que pour l’Etat, la différence étant supportée par les contribuables. Confier ces travaux à divers groupes privés empêche enfin les économies d’échelle que permettent des équipements standards nationaux.
Les attentes de la puissance publique sont souvent ignorées en phase de conception, alors qu’au bout de la chaîne de production, c’est elle qui supporte les coûts et les risques de défaillance. Ainsi, le PPP du centre Hospitalier Sud Francilien a cumulé un retard de huit mois et 8000 erreurs de construction. Pourtant, ces défaillances, imputables à Eiffage, seront à la charge de la collectivité avec une réévaluation à la hausse des loyers et un surcoût de 100 millions d’euros pour des travaux non prévus dans le contrat originaire : le PPP empêche toute flexibilité et toute adaptation du service, puisque la puissance publique passe un contrat, et doit payer toute modification si le contexte change ! En plus du contribuable, l’usager est aussi pénalisé par ces projets qui répondent aux logiques financières avant les besoins humains concrets. L’hôpital de Jossigny en Seine-et-Marne a confié son parking pour 30 ans à la société Vinci, qui impose un stationnement payant à tous les usagers. Ainsi, aller à l’hôpital ou rendre visite à un proche – rappelons que les plus pauvres sont plus touchés par les problèmes de santé ! – oblige à payer un groupe privé. Il s’agit donc ni plus ni moins que de racket organisé.
PPP ou écosocialisme ! En juillet 2012, l’association Nord Écologie Conseil a porté plainte contre X pour « pollution de nappe phréatique ». Elle vise le déversement par Elisa, filiale du groupe Eiffage, de plus de 60.000 tonnes de cendres volantes dans les galeries souterraines situées en-dessous du chantier… qui menacent d’entrer en contact avec la nappe phréatique : en plus des usagers, des salariés, des contribuables et des électeurs, la loi du profit menace aussi les générations futures ! |
Non à la finance !
Les PPP promeuvent la financiarisation de l’économie et la rente. Les services publics deviennent de simples actifs dans des portefeuilles d’action : ils doivent rapporter des dividendes. Le marché du PPP est, de par ses procédures, oligopolistique : 3 trusts se répartissent 92% des grands projets (Vinci, Bouygues et Eiffage), d’où des suspicions d’ententes, corruption, favoritisme…
Enfin, les PPP sont une des exigences austéritaires fondamentales de l’Union européenne : « les partenariats public-privé peuvent aider les autorités publiques à créer de l’emploi en continuant à investir dans le futur, tandis que nous mettons en œuvre des stratégies de sortie visant à ramener les finances publiques à l’équilibre. (…) Nous souhaitons que les autorités publiques utilisent davantage et plus efficacement les PPP.» (Barroso, 2009). L’Union européenne soutient obsessionnellement ce mode de financement dans l’intérêt des grands groupes privés !
Ainsi, aux municipales, contre les PPP nous disons : les services publics doivent être démocratiques, efficaces, et peu chers. La municipalisation, c’est automatique !
L’écotaxe Le PPP choisi pour récolter l’écotaxe est le plus cher jamais signé par l’Etat français : 3,2 milliards d’euros versés sur 13 ans à la société « Ecomouv » (détenue à 70% par une entreprise italienne d’autoroutes, Autostrade). Le contrat qui lie l’Etat à la société italienne demeure confidentiel. Le coût de la collecte par Ecomouv est estimé à 20% des recettes de la taxe (240 millions) versés chaque année à Ecomouv : vingt fois plus que le coût moyen de recouvrement de l’impôt en France. De plus les services des douanes seront chargés de poursuivre les contrevenants, au frais de l’Etat. L’écotaxe devait être mise en place dès avril 2013 mais Ecomouv n’était pas prête ! En négation de tous les principes républicains, l’écotaxe signe le retour à la « ferme générale », la perception de l’impôt par un acteur privé, abolie par la révolution de 1789. Le PPP a subi une procédure pour corruption : le tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait cassé l’appel d’offre confiant le marché à la société Ecomouv à la suite d’un signalement au service central de prévention de la corruption fait par Pierre Chassigneux, ex-président de la SANEF – société française en lice pour le contrat. En effet, dans ce PPP, le cabinet Rapp Trans, conseiller de l’Etat, était aussi conseiller d’Autostrade…. Mais Thierry Mariani, alors ministre des transports, a fait appel de la décision du tribunal et obtenu satisfaction au Conseil d’Etat. Pierre Chassigneux a subi des pressions et a été remplacé par Alain Minc à la tête de la SANEF. |
Les 20 000 et cinq de Roanne
Jean-Paul, Cristel, Gérald, Didier, Christian et les autres… Nous étions 20 000, le 5 novembre, à soutenir les cinq de Roanne qui comparaissaient pour la 3e fois devant les tribunaux, 20 000 à contester cet acharnement antisyndical. Rappelons que le crime originel de ces syndicalistes de la CGT est d’avoir tagué, en 2010, un trottoir et un mur de slogans contre la réforme des retraites. Après une condamnation à 2 000 euros d’amende chacun et une inscription au casier qui signifiait pour les cinq fonctionnaires la révocation, un jugement en appel les dispensait de peine. Ils furent néanmoins convoqués en mai 2013 pour subir un prélèvement ADN qu’ils refusèrent. Nouvelle intimidation : la police fit irruption à l’aube à leur domicile, perquisitionna (!), les embarqua pour une garde à vue et le tout fut suivi d’un nouveau passage en correctionnelle, le 5 novembre. Verdict le 17 décembre prochain.
La volonté d’impressionner le mouvement syndical paraît d’autant plus manifeste que le cas des cinq de Roanne n’est pas isolé. Il fait écho à une cinquantaine d’autres selon la CGT, dont une poursuite pour distribution de tracts sur la voie publique, des mises en examen pour manifestations de soutien à un collègue licencié abusivement, etc. Sans parler du recours au FNAEG (fichier national des empreintes génétiques) créé à la suite de l’émotion suscitée par des crimes sexuels puis aménagé par Sarkozy dès 2003. Celui-ci élargit alors le fichier aux infractions mineures comme l’arrachage d’OGM, les tags etc. et permit d’y faire figurer les simples suspects. Un refus de prélèvement expose à une peine pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. A ce jour, 2 millions de personnes y figureraient dont 80% de présumés innocents. Un dispositif de classe qui s’inquiète des « dégradations » mais pas des casses d’usine et qui dans les 137 infractions répertoriées a « oublié » la délinquance financière.
Il ne faut pas s’étonner que la droite ait fait le boulot. Elle était au pouvoir pour ça. Mais on déplore qu’une gauche proclamée ne soit pas revenue sur un dispositif aussi scélérat que le FNAEG et se soit refusée « à entrer dans la logique de l’amnistie » de syndicalistes incriminés pour avoir seulement exercé des droits démocratiques. Les 20 000 qui se sont réunis autour des cinq de Roanne ont eux compris où était leur devoir. Nous serons encore plus nombreux la fois prochaine dans la rue pour défendre les nôtres.
Jean-Luc Bertet